Dero Goi (Oomph!) et Chris Harms (Lord Of The Lost) se languissent. Plutôt que de prendre des vacances confinées, les deux compères à chapeau décident d'unir leurs efforts pour créer une drôle de créature à mi-chemin entre metal gothique et metal indus : ''Panoptikum'' est né !
L'album démarre dans le bruit et la fureur avec la profession de foi de notre néo-groupe, une montagne russe marquée par son rythme entraînant et enjoué à la Rammstein et par les virages à 90 degrés plus intimistes soulignés par une guitare acoustique et des chœurs éthérés. Ce morceau est emblématique de la schizophrénie de Die Kreatur qui oscille entre deux pôles. La marque de fabrique de Die Kreatur est d'offrir par ses caresses un refuge contre l'agression permanente. La subtilité est telle que malgré leur tension inhérente, certains titres offriront un visage un peu plus atmosphérique, comme 'Kälter Als Der Tod' ou 'Durch Die Nacht' que l'on pourrait identifier à des ballades. 'Benutz Mich' accouple un couplet romantique au piano à une partie principale plus survoltée. Les fans de metal indus gothique bien poisseux pourront crier au sacrilège mais force est de reconnaître que cette face bien plus relaxante est sinon surprenante, du moins agréable. La surprise est de taille lorsque démarre l´introduction de 'Schlafes Braut', une valse folklorique germanique avec l'esprit caustique de Lindemann mais menée avec sérieux sans arrière-pensée caustique. 'Gluck Auf' est un croisement mid-tempo entre une guitare quasi-blues et des sonorités proches de l'accordéon sur les refrains. Mais que l'auditeur des ténèbres ne s'épouvante pas. 'Zwei 100%' ou 'Untergang' lui permettront de boire sa coupe de soufre tandis que la vénéneuse 'Mensch Machine' a le regard porté vers les premiers albums de Nine Inch Nails.
Les claviers occupent une place centrale et étincellent comme des champignons atomiques. Les voix des deux interprètes nous redressent comme un coup de fouet et rappellent inévitablement celle de Till, l'espiègle chanteur de Rammstein. Mais si l'on peut saluer le groupe qui assume de chanter dans sa langue d'origine, les plus curieux d'entre nous seront frustrés de ne pas comprendre les paroles sans s'armer de l'aide d'un dictionnaire. Toutefois malgré ses qualités susdites, la damnée était trop belle. Le principal grief de l'album est sa durée un peu conséquente : passées quelques surprises, certains morceaux apparaissent comme des doublons ('Was Mir Am Wichtigsten', 'God Verdammt' malgré son orgue) et dans la durée, l'auditeur décroche. Il aurait mieux valu que certains titres ne soient que des bonus sur des éditions de luxe, en particulier en fin de parcours. Fidèle à son genre, le groupe offre deux remixes qui raviront peut-être les fans mais certains déclineront ce dessert trop copieux.
Par une nuit sans lune, deux savants allemands ont donné vie à une créature hybride. Rageuse, elle emporte tout sur son passage avec des rythmes metal indus mais à la minute suivante, elle se montre poignante, ethérée et atmosphérique. Si le résultat final est loin d'être un échec, on regrettera la longueur un peu démesurée de l'album qui au lieu d'aiguiser l'intérêt l'amenuise. Les surprises que le groupe nous propose sont certes agréables mais Die Kreatur devrait varier ses délices.