Le quatorzième disque de Waltari est sorti le 20 mars 2020, autant dire que cette information est passée totalement inaperçue à côté de l’événement politico-sanitaire que le monde a connu à cette période. En ces temps d’euphorie post-traumatique, sa découverte a une saveur particulière.
Le metal fusion dont les Finlandais affinent la combinaison depuis plus de vingt ans a ce côté dépaysant qui rend l’écoute de chaque album intéressante. On reste d’ailleurs sur une très forte impression quand cinq ans auparavant Waltari faisait paraître un revendicatif et explosif "We Are Waltari".
C’est par le biais de refrains fédérateurs et généreux en mélodies que la séduction opère dans un premier temps. Prenons ceux de ‘The Way’ et ses « Hey Hey Hey » entêtants qui détonnent au milieu d’un magma thrash ou les « Who Oh Oh » de l’improbable ‘Going Up The Country’ issu la culture hippie américaine. Il y a des évidences pop encore plus manifestes dans les gentillets ‘Sick’n’Tired’ et ‘Had It All’, les nu metal ‘Postrock’ et ‘Skyline’, ou ‘Metal Soul’ et son côté 6:33 grisant. Au moins au début du disque l’auditeur à l’incroyable sensation d’enfin maîtriser une œuvre de Waltari.
Mais cette concession à une forme d’alignement sur des standards plus commerciaux est fortement trompeuse. Plus que jamais il est vain de décortiquer en détail tous les morceaux de Waltari. Fidèle à son côté aventurier, le groupe continue de visiter les styles, passant sans vergogne de l’electro rap solaire ‘Skyline’ au thrash blackisant à l’ambiance lourde de ‘No Sacrifice’ sans oublier la nostalgie 80’s avec claviers et guitare folk de ‘Sick’n’Tired’. Et quand il s’agit de reprise, les Finlandais choisissent l’indus' pour donner une version très personnelle dans ‘Boots’ du ‘These Boots Are Made For Walkin’ de Nancy Sinatra.
Au fur et à mesure du déroulement, Waltari se joue de l’auditeur et s’amuse à brouiller toutes ses intuitions. Les assemblages deviennent toujours plus insaisissables et les fusions magistralement audacieuses. Comment ne pas être cueilli quand le banjo vient flirter avec le techno-thrash voivodien dans ‘Orleans’ ou devant la déclinaison finale qui voit se succéder un metal progressif que l’on jurerait sorti de la tête de Romeo (‘And The’), un indie rock accrocheur (‘Sand Witch’) et une power ballad chargée en saccharose (‘Beloved’).
"Global Rock" ne ment pas sur la marchandise, c’est un véritable condensé de rock modernisé qui est proposé. Waltari accouche d’une œuvre une fois de plus foisonnante qui bouscule les schémas calibrés et promet des découvertes à chaque écoute. Waltari demeure un des trois groupes à connaître absolument pour ceux qui aiment le metal fusion complètement barré.