Le besoin de défricher de nouveaux sentiers, telle est la motivation de Vegard Sverre Tveitan alias Ihsahn. C’est dans cet esprit qu’il a envisagé de sortir à quelques mois d’intervalle deux EP avant de s’atteler à un nouvel album.
"Telemark" et "Pharos" sont clairement un terrain de grande liberté pour Ihsahn avec trois compositions originales et deux reprises dans chacun des EP. "Telemark", du nom du comté dans lequel a grandi Ihsahn, a quelque chose d’authentique avec peu d’arrangements, si ce ne sont les cuivres omniprésents, et de très introspectif car Ihsahn y chante pour la première fois en norvégien et aborde ses racines musicales avec un certain classicisme. Cela s’incarne dans les trois créations de musique black brute et glaciale (‘Nord’ et ‘Stridig’) ou plus progressive (‘Telemark’) et les deux reprises d’un rock très direct avec ‘Rock’n’Roll Is Dead’ de Lenny Kravitz et ‘Wrathchild’ d'Iron Maiden.
"Pharos" est l’antithèse de "Telemark" avec des compositions mid-tempo chantées en anglais avec voix claires et un style pop-rock très arrangé. Si ‘Losing Attitude’ et ‘Pharos’ conservent encore quelques éléments qui les font sortir du champ strict de la pop avec un appareillage rythmique martelé, quelques saturations sévères et une salve d'incantations intimidantes, ‘Spectre At The Feast’ est un titre pop-rock sans concession. Et quelle réussite ! Ce morceau est une pépite de mélodie et de finesse qui devrait, dans un monde qui tournerait rond, inonder les ondes.
Les deux reprises sont une fois de plus surprenantes avec ‘Roads’ de Portishead et surtout ‘Manhattan Skyline’ de A-Ha. ‘Roads’ est intéressante car on y entend Ihsahn tout en fêlure moduler sa voix comme rarement, démontrant une fois de plus ses progrès en chant clair. ‘Manhattan Skyline’ est parfaitement chantée par Einar Solberg de Leprous avec une ressemblance troublante avec l’original mais on regrette qu’Ihsahn ne se soit pas essayé sur ce titre en décalage vocal avec son style.
Ces deux EP illustrent la grande complexité de l’artiste Ihsahn et l’étendue de ses dons musicaux. Tout ce que le Norvégien aborde s’avère juste sans manquer de conserver toutes les empreintes de sa signature personnelle. "Telemark" et "Pharos" explorent deux des nombreuses facettes de l’artiste et constituent un interlude de grande qualité avant un prochain album.