BLACK FOXXES: Black Foxxes (ROCK) : avis / chronique à lire sur Music Waves

"I’m Not Well" avait été une révélation, et "Reiõi" une petite déception. Après un premier album rock viscéral et cathartique, Black Foxxes avait, avec le deuxième, cédé au chant des sirènes de la pop mainstream, nous laissant inquiets quant à son avenir. Nous espérions secrètement que le trio retrouve au plus vite l’urgence des débuts. Mark Holley semble avoir fait une analyse similaire. Black Foxxes est sa créature, sa raison de vivre et sa thérapie. Rongé par la maladie de Crohn et les effets secondaires de son traitement, entre dépression et alopécie, le chanteur et guitariste en a fait son seul exutoire. C’était sans doute trop lourd à porter pour ses compagnons de route originels. Ant Thornton et Tristan Jane ont dû quitter le navire, remplacés par le batteur Finn McLean et le bassiste Jack Henley. Avec cette nouvelle section rythmique, Mark Holley a pu se recentrer sur lui-même pour composer un nouveau chapitre de son chemin de croix, le plus beau et le plus émouvant de la discographie du groupe.

Ce troisième album est autant un retour aux sources qu’un nouveau départ et une nouvelle orientation de la musique de Black Foxxes. Le son du groupe est presqu’aussi brut que sur "I’m Not Well", grâce à un son de batterie très naturel et une basse très présente, pure et organique (‘My Skin Is’). Cette ambiance underground, entre post grunge et rock garage, est soutenue par des compositions toutes en tension reflétant parfaitement l’état d’esprit d’un Mark Holley toujours à la limite de la rupture, en équilibre entre le désespoir (‘Panic’) et l’acceptation résignée de son mal être (‘Jungle Skies’). Sa voix remplie d’émotion illumine tout l’album et côtoie les abîmes d’une folie qu’il a appris petit à petit à maîtriser et à accepter (le magnifique ‘Swim’).

Si Radiohead reste une inspiration majeure pour Black Foxxes (‘Panic’, ‘Swim’), la musique du trio s’enrichit de nouvelles textures très excitantes avec ce troisième album. Empruntant tour à tour au noise rock (‘I Am’) et au post punk de Joy Division (‘Badlands’) et de The Cure (‘Pacific’), Mark Holley ne s’impose aucune limite, jusqu’à flirter à plusieurs reprises avec le shoegaze et ses guitares rageuses (‘My Skin Is’, ‘The Diving Bell’). Il en résulte des compositions inspirées et bien construites, souvent surprenantes dans leur capacité à combiner mélodies et dissonances, et toujours intéressantes par leur capacité à maintenir une tension schizophrène permanente.

Intense et émouvant, ce troisième album de Black Foxxes est une vraie réussite. Mark Holley nous invite à partager avec lui ses doutes et ses failles et à l’aider à accepter ses démons. Il s’y livre sans masque et sans fard. Une telle mise à nu et une telle sincérité sont si rares à notre époque dominée par l’apparence et la dictature de la perfection qu’elles sont d’autant plus belles et précieuses. Si vous cherchez l’album rock de l’année, vous l’avez trouvé.

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