Qu'est-ce qui peut passer dans la tête d'un enfant lorsqu'il découvre des chanteurs, quand il se forge son éducation musicale ? C'est un peu la question que l'on pourrait poser à Jay Ryan Beretti qui a découvert Elvis Presley dès ses plus jeunes années. Il faut dire que le King est et reste aux Etats-Unis (et dans le monde) une icône du rock, le symbole qui a popularisé le genre au-delà des origines. Le Français va ainsi tout faire pour vivre pleinement son rêve, celui de devenir un artiste à l'image de son idole. Pour cela, il va s’entraîner, participer à des festivals de musique américaine qui se déroulent en France. Petit à petit ses prestations vont commencer à intéresser les Américains jusqu'au point d'être sélectionné par Graceland pour représenter la France à Memphis en 1997, à l'occasion de l'hommage rendu à Elvis Presley pour les 20 ans de sa disparition.
Ce concours, loin des clichés tels qu'ils sont présentés par les médias mainstream qui les résument souvent en des épreuves de sosies d'Elvis en fin de vie, a été le déclic pour Jay Ryan pour poursuivre son aventure américaine. Fort de son succès, il fait la première partie de Big Al Downing (collaborateur de Fats Domino notamment) qui va le prendre sous son aile afin de lui écrire (avec Jerry Phillips, fis de Sam Phillips créateur de Sun Records) des chansons pour son premier album ("Runaway Heart") sorti aux débuts des années 2000.
Il aura fallu 20 ans pour que le second album, "Superman", déboule dans les bacs. Ce dernier est constitué à la fois de compositions personnelles et de quatre relectures de titres parfois surprenants (The Cure, David Guetta). Avec un tel parcours, on pouvait se douter que l'album baignerait dans un rock très 60 voire 70, une ode au rockabilly. Ce n'est pas tout à fait le cas. Jay Ryan Beretti ne reste pas enfermé dans un carcan et dissémine au fil des titres d'autres influences qui apportent de la diversité à un album dont on aurait pu penser qu'il serait monolithique. Lorsqu'on écoute cet album, on se rappelle les albums de Chris Isaack ou Chris Rea qui ont notamment le point commun de posséder une tessiture singulière.
"Superman" est donc plus une carte de visite de l'étendue artistique du chanteur-compositeur qu'une sorte d'hommage. Comme une traversée de l'Amérique des grands espaces, on retrouve des éléments country rock ('Superman'), de blues rock ('I'm Down'), de blues plus traditionnel ('Bensonhrost Blues'), de gospel ('Without My Baby'), de chanteur de charme typique d'Elvis ('Don't Cry Baby'). La voix de Jay Ryan est telle un caméléon qui s'adapterait à la couleur musicale du style abordé dans les chansons. Elle est claire, puissante et surtout paraît naturelle. Les reprises quant à elles bénéficient d'une relecture intéressante qui leur donne une nouvelle vision comme 'Lovers On The Sun' plus organique avec son refrain épique et ses passages énervés. L'une des qualités à souligner de l'album est de laisser de la place à l'instrumentation et à la musique, en n'étant notamment pas avare en courts soli de guitare.
17 ans après son premier album, Jay Ryan Beretti propose "Superman", un album super héros d'un style rock aux embruns d'Elvis, mais pas seulement, dont il se revendique de manière respectueuse et plutôt réussie si on est sensible au style.