Après un "Black Roses" (2008), produit par Desmond Child, et un best-of paru en 2009, The Rasmus est passé dans une autre dimension, même si le succès de ‘In The Shadows’ ("Dead Letters" – 2003), lui avait déjà offert un succès intercontinental. Afin de commencer à composer le nouvel opus des Finlandais, Lauri Ylönen se rendit chez son compère guitariste Pauli Rantasalmi. Ce qui commença à sortir des premières séances ne correspondait clairement pas à l’identité du quatuor d’Helsinki, mais Lauri n’avait aucune envie de jeter ces compositions à la poubelle. Il décida alors de les conserver pour en faire un album sous son propre nom. Sorti sous son label (Dynasty), composé, interprété et produit par ses soins (sauf deux titres coproduits avec Pauli Rantasalmi), "New World" sort ainsi en 2011 et va désarçonner de nombreux fans de The Rasmus, justifiant ainsi la démarche individuelle du chanteur.
Dès ‘Disco-nnect’, le choc est brutal ! Beats de basse jouant avec la monotonie, paroles répétées ad libitum, loops électros alternant les sonorités, la surprise est de taille. Pourtant, ce titre d’une profonde tristesse se révèle finalement captivant et la curiosité l’emporte, encourageant l’auditeur à découvrir la suite de cet objet sonore non identifié. Et il faut bien reconnaitre qu’il aurait été dommage de ne pas se lancer dans cette aventure dépaysante dont l’approche expérimentale et la prise de risque méritent à elles seules le respect. Dans un ensemble exclusivement synthétique et électronique, la mélodie réussit à se frayer un chemin sur des titres tels que les singles ‘Heavy’ et ‘In The City’ aux refrains accrocheurs et à l’ambiance pop rappelant le travail de l’artiste au sein de sa formation d’origine.
En revanche, le reste n’a rien à voir avec l’univers de The Rasmus, en dehors d’une mélancolie récurrente typique des formations finlandaises. ‘Have A Little Mercy’, éclairé par un refrain mêlant espoir et supplication, et le plus martial ‘You Don’t Remember My Name’ aux rythmiques presque industrielles et au refrain martelé et obsédant, se révèlent les pièces les plus dansantes. ‘What Are You Waiting For ?’ vient quant à lui s’acoquiner avec un Vangelis époque "Blade Runner", véritable course vers la lumière ne bénéficiant de paroles que sur ses début et fin. ‘Hello’ et ‘Because Of You’ représentent la face spectrale de cet opus, véritables rayons de lumière blafarde figés dans une glace de désespoir, alors que ‘Got You On My Mind’ se fait plus baroque et cinématique, offrant finalement une ouverture vers la résilience et une certaine forme de renaissance. Enfin, le titre éponyme semble rendre hommage à Kraftwerk pour une sorte de générique de fin spatial et répétitif sur lequel vient se poser une voix féminine et robotique.
Autant dire qu’avec cette œuvre personnelle et expérimentale, le chanteur au visage enfantin n’a pas choisi le chemin de la facilité et du formatage commercial. Cela ne l’a pas empêché d’obtenir un immense succès sur ses terres natales, et cela n'a pas manqué de renforcer sa crédibilité artistique. Si vous n’êtes pas rebutés par les sonorités synthétiques et que la profonde mélancolie des terres septentrionales ne vous effraie pas, il vous est fortement conseillé de tenter l’expérience dépaysante et hypnotique de l’écoute de ce "New World" qui porte parfaitement son nom.