S'il n'est pas toujours facile de suivre les Finlandais depuis leur premier opus ('Inherit The Eden" – 2007), il faut bien reconnaître que Hanging Garden est une formation qui n'hésite pas à prendre des risques. Passant d'un doom-death mélodique typiquement scandinave à des terres presque sludge ("Teotwawki" – 2009) pour revenir vers ses fondamentaux le temps d'un "At Every Door" (2013) de haute volée, le groupe de Mikko Kolari nous avait à nouveau surpris avec un "Blackout Whiteout" (2015) se voulant plus accessible. Alors que l'EP "Hereafter" (2016) semblait vouloir marquer un nouveau retour aux racines, le gang d'Helsinki revient avec un "I Am Become" attendu avec un mélange d'espoirs et de doutes.
Et comme pour ne pas laisser ces derniers s'installer, 'As Above, So Below' frappe d'entrée sans la moindre introduction, direct dans le buffet sans échauffement. L'effet de surprise passé, c'est pourtant bien le Hanging Garden traditionnel que nous retrouvons avec son doom-death mélodique en équilibre entre mélancolie et colère. Puissant et propulsé par la batterie riche et dynamique du nouvel arrivant, Sami Forssten, il flirte avec les frontières d'un post-rock à la pâle lumière septentrionale. Mais si les Finlandais confirment un nouveau retour vers leur identité originelle, ils n'en manquent pas pour autant de persister dans des expérimentations parcimonieuses mais leur permettant de ne jamais se scléroser. Ainsi 'Our Dark Design' n'hésite pas à s'engager dans une lourdeur et une grisaille indus' avec son chant martial et son riff lancinant nous écrasant sous une véritable chape de plomb. De son côté, 'Kouta' enrichit son metal de touches électro aux effluves dignes de Depeche Mode sans pour autant ôter sa cohérence à un ensemble qui passe régulièrement de l'anglais au finnois.
Ce sont toutes ces touches qui amènent une variété captivante à un ensemble envoûtant auquel Tomi Joutsen (Amorphis), Niko Kalliojärvi (Amoral) et Riikka Hatakka apportent également un air extérieur certes toujours glacé, mais régulièrement renouvelé. Bercé entre des pièces plus accessibles mais à la lumière hivernale mélancolique ('Elysium', 'Ennen'), des saillies plus coléreuses aux murs de guitares et aux claviers blafards lézardés par quelques envolées aériennes ('Hearthfire'), l'auditeur s'abandonne aux pièces les plus épiques sur lesquelles plane parfois l'ombre de Swallow The Sun (le sombre et déchirant 'From Iron Shores' ou le glacial 'Forty One Breaths'). Dans cette dernière catégorie, 'One Hundred Years' se veut quant à lui une célébration critique du centenaire de l'indépendance finlandaise (1917-2017) alternant les passages planants et les growls écorchés avant de s'apaiser sur un final symphonique et crépusculaire.
Sans pour autant se transformer en une pâle copie de "At Every Door", "I Am Become" n'en est pas moins un retour vers les terres qui avaient fait le succès de ce dernier. Cependant, en dotant son nouvel opus de nouvelles expérimentations et d'une superbe production, Hanging Garden offre une œuvre riche, d'une variété captivante et d'une tristesse envoûtante. Si vous n'êtes pas effrayés par les paysages enneigés, les lumières blafardes et une profonde mélancolie, n'hésitez pas à vous engager dans ce voyage qui bousculera vos émotions et ne vous laissera pas indemnes.