Il ne faut pas grand-chose pour qu'une pochette nous fasse de l'œil. Le dessin d'une fille nue a depuis longtemps démontré son efficacité pour cela. Souls Of Tide l'a bien compris, comme en témoigne le visuel de "Black Magic". Les amateurs de (hard) rock vintage n'auront cependant pas besoin de cet artifice pour se jeter sur cette rondelle, la mémoire toujours marquée au fer par "Join The Circus" sa devancière qui, il y a quatre ans déjà, dévoilait un groupe biberonné aux seventies. "Un de plus", regretteront peut-être les détracteurs de ce revival qui déçoit pourtant rarement.
Certes, rien ne distingue vraiment les Norvégiens des autres nostalgiques de leur espèce. A leur écoute, on devine qu'ils sont tombés tout petits dans une marmite où cuisaient aussi bien Led Zep que Deep Purple ou Rainbow et Uriah Heep. Gorgé de feeling, le chant trempe dans le jus de Robert Plant et autres David Coverdale, l'orgue pourrait être secoué par Jon Lord ou Ken Hensley, la rythmique groove avec un grand G et la guitare crache des mélodies acérées comme le Blackmore de l'âge d'or ('Morning Star', 'Black Magic') tout en sachant faire preuve d'une émotion bluesy que ne renierait pas le défunt Gary Moore ('Interlude').
Et s'il est permis de s'interroger sur cette mode qui consiste à reproduire ce que faisaient nos aînés comme le symptôme d'une époque où l'on n'est plus capable d'innover, force est de reconnaître que, dans ce créneau aussi embouteillé que le périphérique parisien aux heures de pointe, Souls Of Tide s'élève réellement au-dessus du lot. Outre sa capacité à saisir ce qui faisait la force et le charme de ce rock des années 70, chaud et vitaminé, il doit cette prouesse à la qualité de ses compositions qui toutes brillent de mille feux. De magie (noire), il n'est pas vraiment question si ce n'est celle qui enrobe cette seconde fournée touchée par la grâce. Véritable florilège du hard seventies, son intimité oscille entre brûlots remuants et perforations plus ambiancées.
Au rang des premiers, citons 'Voodoo Ritual' qui ouvre la porte avec mordant comme à la grande époque. Les déjà nommés 'Morning Star' aux lignes de guitare rutilantes et 'Black Magic' que sabre une puissante partie instrumentale cultivent également cette veine teigneuse tout comme 'Evening Star' qui baigne dans des claviers humides sur fond de rythmique pulsative. Là encore, le manche de Ole Kristian Østby rugit, gonflé d'une sève noueuse et émotionnelle. Quant au registre lent et zeppelinien, il inspire au groupe les tout aussi grandioses 'Firegirl', 'Through The Fire' que l'organe de Vegar Larsen irradie de chaleur, sans oublier 'The Offering' et ses faux airs de 'Kashmir'.
Alignant huit titres en moins de quarante minutes, "Black Magic" ne connait pas le remplissage, opus franchement imparable taillé dans le meilleur du hard rock des années 70, confirmant par là-même le potentiel de ses géniteurs.