Panem est une formation tourangelle de quatre musiciens emmenés par le guitariste Yacine Aït Amer. L’année 2020 aura été spéciale sur de nombreux plans, pour Panem elle sera surtout celle de l’éclosion avec un premier EP intitulé "Zeitgeist/Absolute Monopoly" qui permet de découvrir l’univers de ce groupe français.
La musique de Panem attire l’attention dès la première écoute par l’intermédiaire de l’accroche charmeuse de la voix de Marie Morrow et de la musicalité globale des titres. "Zeitgeist/Absolute Monopoly" est de ces albums dont l’expérience première donne la conviction que les écoutes successives apporteront de nouvelles satisfactions. Satisfactions dans la diversité du rock dont est pourvoyeur Panem, avec une aisance à passer de la pop lumineuse (‘Zeitgeist/Absolute Monopoly’) à la soul (‘Something I Don’t Know’) ou le rock plus nerveux (‘Face Tomorrow’ et ‘The Empty Man’).
Instrumentalement, le collectif maitrise son sujet sans en faire trop. Panem soigne ses riffs percutants (‘The Empty Man’, Face Tomorrow’) et ses solos de guitare jazzy (‘Something I Don’t Know’) ou metal (‘The Empty Man’) avec la même application que l’arpège délicat de sons clairs, et mobilise avec brio les arrangements de claviers et la chaleur des instruments acoustiques. "Zeitgeist/Absolute Monopoly" est à l’orée du rock progressif quand Panem fait durer pour notre plaisir une thématique jouée à la guitare sur la fin de ‘Breath Prentender’ ou quand il offre de belles garnitures instrumentales, comme la plage atmosphérique de ‘Zeitgeist/Absolute Monopoly’ ou les tonalités orientales du jouissif et heavy ‘Face Tomorrow’.
Satisfaction enfin dans la part qui est laissée à l’émotion qui affleure tout au long de l’album. Elle est grandement propagée par le chant principal et les chœurs qui accueillent l’auditeur et l’aident à traverser toutes sortes d’ambiances, de la plus douce (‘Zeitgeist/Absolute Monopoly’) et chaleureuse (‘Something I Don’t Know’) à la plus solennelle (‘A Line In The Sand’ comme une prière avec ses phrases répétées).
Le projet Panem va au-delà de ses qualités musicales indéniables. Il y a une recherche sérieuse dans les sujets abordés (la manipulation dans ‘Zeitgeist/Absolute Monopoly’, les accords Sykes-Picot aux conséquences majeures au Moyen-Orient dans ‘A Line In The Sand’, ou ‘Face Tomorrow’ qui aborde les tensions et drames en Palestine) et forcément une connotation conceptuelle avec certains termes choisis. On pense bien évidemment au nom du groupe, tiré de la fameuse locution satirique latine panem et circenses (du pain et des jeux du cirque), et au titre de l’EP qui mentionne le Zeitgeist, que l’on peut traduire par l’esprit d’une époque et qui a structuré de nombreux développements philosophiques du XXe siècle.
Ce premier EP de Panem est une franche réussite au niveau conceptuel avec une réflexion sur les sujets et les mots, et musical par la diversité des compositions et la subtilité des mélodies. Et pour donner vie et sensibilité à cette musique il y a quatre musiciens de grand talent. Avec une telle capacité à varier son propos tout en conservant sa personnalité, Panem affiche un potentiel qui pourrait le mener loin.