A ceux qui pensent qu'un "vrai" disque de progressif se doit de contenir au moins un epic, voilà un album qui, sur la forme, devrait les satisfaire : en effet, "Endurance of the Obsolete", la nouvelle production d'Apogee, ne contient pas moins de trois titres excédant les dix minutes, dont 'Overruled' qui culmine à 16'35, et deux autres titres frôlant cette même barre.
"Endurance of the Obsolete" est le dixième album d'Apogee, projet du multi-instrumentiste Arne Schäfer (Versus X), toujours et uniquement accompagné à la batterie de son fidèle second Eberhard Graef. Et autant le dire tout de suite, c'est là que le bât blesse pour cet album. Car si les qualités de musicien d'Arne Schäfer ne sauraient être mises en doute, en attestent les nombreuses et savoureuses interventions des claviers et des guitares, tant électriques qu'acoustiques, l'homme s'avère être un piètre chanteur.
Et malheureusement, le chant est assez présent sur les six titres que compte l'album. La voix d'Arne Schäfer est plate et peu puissante. Non seulement son phrasé est assez monotone, mais son timbre est peu agréable et ne véhicule aucune émotion, très proche des pauvres prestations d'Andy Tillison (The Tangent). Ce qui est vraiment rageant, car les compositions ne manquent pas, elles, d'intérêt. Elles distillent un prog mélodiquement agréable, pas particulièrement innovant mais bien construit, utilisant de nombreux timbres d'instruments et avec tout ce qu'il faut de changements de tempo et d'ambiance pour satisfaire l'amateur d'un progressif classique et sage. La musique s'apparente au prog des seventies, rappelant ici et là les Grands Anciens : 'Waiting for the Dawn' sonne comme un vieux Genesis sur lequel la guitare de Steve Hackett égrènerait ses arpèges pour un moment vraiment agréable, et 'Interpretations' offre une intervention a cappella de voix superposées dont Gentle Giant a déposé le brevet avec 'Knots'.
Mais rien n'y fait ! Malgré la qualité des compositions et de l'interprétation instrumentale, le chant vient systématiquement gâcher le plaisir de l'auditeur, déjà entamé par une production presqu'aussi plate que la voix du chanteur. Restent de beaux passages instrumentaux et des idées musicales intéressantes qui sauvent un album qui, doté d'un vrai chanteur et d'une production plus contrastée, aurait été excellent.