"Je vis sur cette terre, mes ancêtres me l'ont transmise. L'amour de mon peuple est partout où je le vois." Cette terre, c’est la Nouvelle Zélande. Grant Haua la chante en anglais, et en maori le temps d’une très belle chanson, ‘This Is The Place’. Une chanson que seuls les descendants des peuples millénaires sont capables d’écrire. Une chanson tout en simplicité et en retenue, à l’image de ce très bel album du bluesman maori, "Awa Blues".
Même si l’Océanie est bien loin des rives du Mississippi, le blues est un langage universel. Grant Haua en connaît tous les codes et lui insuffle la chaleur de sa voix rocailleuse, dont la moindre intonation laisse deviner que sa vie n’a pas été un long fleuve tranquille. Cette vie, bercée par les addictions de sa mère et ses amours compliquées, Grant Haua la raconte au fil de textes subtils et poétiques posés sur une musique country blues acoustique toute en sincérité et en maîtrise technique.
Car Grant Haua, en plus d’être un excellent songwriter, est aussi un très bon guitariste. Sa technique de picking flirte souvent avec le bluegrass (‘Can’t Let Go’, ‘Devil Is A Woman’, ‘Keep On Smiling’, ‘My Baby’) et confère à son blues acoustique un groove chaleureux qui rappelle plus d’une fois les heures de gloire de Keb’Mo’ (‘Keep On Smiling’, ‘Tough Love Mumma’). Parsemées d’arpèges de piano délicats, les compositions du Néo-zélandais sont aussi instinctives que subtiles et savent ménager leurs effets, à l’image du solo lumineux de Fred Chapellier sur ‘This Is The Place’.
Toujours à bonne distance entre pudeur et émotion, "Awa Blues" est un album chaleureux et respectueux de la musique américaine à laquelle il doit tout et à laquelle il rend hommage avec une sincérité réconfortante (les ballades country folk ‘Might Have Been’ et ‘Mumma’s Boy’, le clin d’œil à Jimi Hendrix sur ‘Addiction’). En réchauffant le blues des origines au soleil d’Océanie, Grant Haua réussit l’exploit de transmettre sa culture maori à travers une musique universelle. Une très belle découverte.