Jusqu’à l’âge de seize ans, Manuel Barbará n’est globalement intéressé que par l’informatique, et l’univers de la musique lui est assez étranger. Mais des découvertes musicales vont le pousser à se mettre à la guitare. Manuel se lance par la suite dans trois années de pratique intensive et avec les encouragements de son professeur Matthew Mills passe l’audition à Berkeley. Manuel y étudie les compositeurs classiques au même titre que la musique metal actuelle et ambitionne de mettre en parallèle les deux visions dans sa composition. C’est dans cet esprit qu’il a écrit son premier album "Moonrise".
La première sensation d’écoute fait l’effet d’une strangulation de puissance metal articulée autour de riffs à grosses saturations et de changements rythmiques perturbants. Nous sommes clairement dans l’univers du metal progressif instrumental agrémenté d’une bonne dose de djent proche de Periphery et Meshuggah. Manuel Barbará montre des facilités techniques évidentes mais on ne peut pas dire qu’il soit adepte de l’empilement de notes, ses champs de prédilection demeurent le riffing et l’approche rythmique (‘Moonrise’, ‘Children of Prometheus’, ‘Mirrors III’) et rarement les séquences de chorus ni même les soli (‘The God Complex’).
Manuel Barbará signe sa musique de moments de respiration dans de nombreux passages atmosphériques qui prennent davantage de relief quand ils coexistent avec la composante metal (‘Mirrors I’, ‘The Nightmare Weaver’). Parfois agrémentées d’arpèges en sons clairs (‘The Nightmare Weaver’), ces respirations relèvent d’expérimentations sonores qui installent des ambiances célestes enivrantes dont les harmonies originales tranchent avec celles que l’on a l’habitude d’entendre dans le metal progressif-djent et apparaissent comme le véritable marqueur de la formation plus classique de Manuel Barbara (‘Mirrors II’).
Si le metal progressif instrumental de Manuel Barbará pourra séduire les amateurs de puissance et de riffs saccadés, il revêt un intérêt supplémentaire par les influences qu’il tient de sa culture des compositeurs du début du XXe siècle. Paradoxalement, son champ d’action en tant que guitariste le cantonne à une approche rythmique qui laisse à penser que quelques passages plus solistes n’auraient pas été superflus pour donner un peu de lyrisme mélodique et atténuer le martèlement djent.