Entre le jazz et le flamenco, c’est un beau roman, c’est une belle histoire, c’est une romance de plusieurs décennies. Les deux musiques aux racines fortes ont su dresser des ponts entre Andalousie et Mississipi sous la houlette de musiciens novateurs comme Miles Davis et son ‘Flamenco Sketches’ enregistré à la fin des années 50. Du côté des guitaristes, si l’on met à part le jazz manouche de Django Reinhardt, c’est bien sûr Paco De Lucia qui fait figure de témoin (et acteur) privilégié du mariage entre la musique gitane et la musique noire américaine. Pas étonnant donc que son influence soit aussi prégnante à l’écoute de cet album de Diego Lubrano, "El Vuelo".
En digne héritier de Paco, mais aussi de Wes Montgomery, Pat Metheny ou encore Sylvain Luc, Diego Lubrano s’attache depuis plus de dix ans à célébrer les noces de platine entre le jazz et le flamenco. Avec "El Vuelo", les liens qui unissent ces deux styles musicaux sont aussi forts qu’aux premiers jours (‘Pour Lulu’, ‘The Moment’) et l’album s’adresse, comme il se doit, avant tout aux amateurs de titres instrumentaux acoustiques délicats.
Cela dit, Diego Lubrano arrive à maintenir l’attention de l’auditeur grâce à une tracklist intelligemment agencée qui lui permet de varier les styles et les ambiances, faisant même parfois quelques infidélités à ses premières amours en allant flirter avec la bossa nova (‘Pour Chacha’) et le jazz manouche (‘Emergencia’). Mais c’est surtout le caractère enjoué des compositions les plus jazz qui emporte l’adhésion (‘Seriously’, ‘La Sabiduria Del Mar’, ‘I Remember Joy’) et rappelle, toutes proportions gardées, le travail mémorable du duo Paco De Lucia/Al Di Meola.
Même s’il est un peu trop sage et appliqué, "El Vuelo" est un album agréable à écouter et idéal pour les longues soirées d’été. Que vous soyez un aficionado du flamenco jazz ou non, vous ne résisterez pas à son charme andalou.