La planète musicale regorge d’ovnis, des disques étranges et délicats à appréhender, qui voient leurs auteurs sortir de leur zone de confort. Dans le genre, Die Apokalytischen Reiter frappe fort avec sa nouvelle livraison, "The Divine Horsemen", qui va bien plus loin encore qu’un "Tief Tiefer" pourtant déroutant. Profitant de la pandémie et du confinement, le groupe a mis en œuvre une idée ancienne. Il s’est réuni avec quelques amis et pendant deux jours et a enregistré tout ce qui lui venait en tête.
Porteur du projet, Fuchs a amené des idées autour des rites et mythes du monde entier, allant vers les Incas, la Scandinavie, le Bouddhisme ou l’Hindouisme et a chanté dans plusieurs langues. L’ensemble a été enregistré dans l’obscurité avec des instruments traditionnels et après un rituel spirituel. Cela a donné 500 minutes de musique totalement improvisées qui ont été retravaillées pour aboutir à 18 chansons.
Présentée comme cela l’idée fait un peu peur, improviser n’est pas une chose aisée et le résultat peut tourner à la catastrophe totale. Mais avec Die Apokalyptischen Reiter cette idée ne semble pas si saugrenue tant il nous a habitué à sortir de l’ordinaire. Le disque est une totale expérience. Les 80 minutes qui en ressortent sont un instant mystique, porteuses d’une aura certaine comme un voyage dans le lointain en forme d’ascenseur émotionnel.
Il y a de la violence brute, teintée de black et de death sur Tiki’, ‘Salus’ ou ‘Amma Guru’, ‘Nachtblume’ ‘Alethia’ et ‘Ymir’. Fuchs hurle comme un damné et nous entraîne au fond des abîmes de l’âme humaine. Le côté mystique et tribal prend aux tripes avec une grande force incantatoire. Cette force s’exprime dans les longs morceaux de l’album. Avec ‘Inka’, ‘Duir’, ‘Uelewa’ puis ‘ Simbi Makya’ et ‘Eg On Kar’ le plongeon est total. L’auditeur navigue dans des ambiances aériennes, éthérées avec le côté tribal mais avec surtout un esprit progressif digne des expérimentations des années 70. Le voyage est cosmique en forme de trip qui fait partir loin. Le sommet vient avec ‘Children Of Mother Night’, chanson planante et pure portée par un refrain profond avec un esprit progressif aventureux digne de l’âge d’or du genre.
"The Divine Horsemen" est une œuvre à part dans la carrière de Die Apokalyptischen Reiter. Il ne plaira certainement pas à tout le monde et s’adresse aux esprits plus aventureux qui aiment les improvisations et les voyages. Celui-ci est impressionnant et confirme le côté vraiment à part d’un groupe qui n’a guère d’équivalent.