Malady est une formation qui aime prendre son temps. Trois offrandes en sept ans, nous avons connu plus productif. Mais ce rythme se veut d'une certaine manière à l'image de la musique tricotée par les Finlandais : bucolique et soyeuse, paisible et lumineuse. Pour ceux qui ne les connaitraient pas encore, sachez qu'ils animent un collectif qui, comme bien d'autres groupes (Sammat, Dust Mountain, Hexvessel) signés chez leur compatriote Svart Records, semble être resté coincé dans une faille temporelle. Héritiers d'une longue tradition progressive et folklorique nationale, ils sillonnent une sente aussi tranquille que rustique tapissée de la chaleureuse patine sonore des années 70. Le chant en finnois ajoute encore une poésie champêtre à laquelle il paraît bien difficile de résister.
Rejoint par un saxophoniste (Taavi Heikkilä) dont les nombreuses interventions le pousse vers un jazz aux senteurs boisées, Malady continue d'enchanter l'auditeur à la recherche de sonorités moelleuses et carrément magiques. Déambulation onirique, "Ainavihantaa" propose six compositions qui sont autant de douces peintures, invites à suivre les Finlandais le long d'un chemin pastoral à travers une clairière nimbée de mystères. Fidèles à une délicatesse de traits comme de touches, jamais ils ne brusquent une écoute gorgée de feeling et d'ambiances douillettes. Guitare élégante, rythmique aux allures de caresses vespérales, orgue Hammond fantomatique et saxophone nocturne, tous les instruments sont au diapason de cette tendresse forestière. Cela ne leur interdit pas une mélancolie printanière à l'image de 'Alava Vaara' qui ouvre la marche avec une gravité diffuse.
Cette tonalité presque dramatique ne résume cependant pas un album placé sous le signe d'une allégresse rêveuse, comme l'illustre 'Vapaa Ja Autio', piste instrumentale brillant de mille feux progressifs. Mais chaque titre possède une teinte qui lui est propre, entre la douceur chaloupée de 'Sisävesien Rannat' sur lequel plane l'ombre du Genesis antédiluvien, plus romantique le temps d'un 'Ainavihantaa' à l'atmosphère onctueuse. 'Dyadi' se veut épique, écoulant sa richesse percussive et jazzy à la manière d'un ruisseau poétique au sein duquel le chant ne forme qu'un élément parmi d'autres. D'ailleurs, malgré le charme unique qu'il dégage, celui-ci reste minoritaire dans un ensemble qui impressionne avant tout par sa palette musicale, témoin ce 'Haavan Väri' dont la durée plus ramassée ne l'exonère pas d'un foisonnement orgasmique, pièce progressive ciselée avec une belle sève créatrice.
Avec "Ainavihantaa", Malady délivre un nouveau joyau enraciné dans le substrat progressif finlandais auquel des influences jazzy viennent s'accrocher, conférant à ce folk rock intemporel une tendre coloration plus charmante encore.