Il est aussi connu dans le milieu de la musique (et surtout de la guitare) que méconnu du grand public. Pourtant Julien Bitoun est une référence dans le petit monde du rock français. Malgré toutes ses casquettes de conférencier, pédagogue, podcasteur, youtubeur, écrivain, vulgarisateur, traducteur, démonstrateur, testeur de matériel et enseignant de l’histoire du rock à Science Po…, le guitariste est avant tout un musicien qui, mine de rien, a sorti en vingt ans des albums à un rythme relativement soutenu. Il a commencé sa carrière en solo (sous le pseudonyme de J. Merrick), l’a poursuivie avec le Julien Bitoun trio, et c’est avec The Angels que Julien Bitoun a trouvé la formule la plus efficace pour faire sonner le rock garage qu’il affectionne tout particulièrement. "Little Ones" est le deuxième album du power trio et s’avère une vraie réussite pour tous les amateurs de rock vintage psychédélique et de songwriting efficace.
"Little Ones" est l’exemple parfait de l’album qui ne paye pas de mine au premier abord et qui s’avère de plus en plus attachant au fil des écoutes, grâce surtout à la sincérité et l’émotion qui pointent derrière chaque titre. Avec simplicité et retenue, Julien Bitoun évoque dans ses textes la société (le magnifique ‘Laughing Gas’ très influencé par Neil Young), ses galères professionnelles (‘Lie To Yourself’), ses enfants (‘Little Ones’), sa femme (‘Little One’), en gardant toujours ses sujets à une distance suffisante pour en faire de vraies bonnes chansons.
La grande force de l’album réside dans des compositions simples mais toujours empreintes d’une vérité qui les rendent la plupart du temps irrésistibles. Et c’est le cas quel que soit le style choisi par le guitariste pour mettre ses textes en musique. Car même si "Little Ones" reste un album rock, influencé par Jack White (‘Explore The World’, ‘Angels’), Tom Petty, la référence absolue de Julien Bitoun (‘Stolen Guitar’, ‘Lie To Yourself’) et les Beatles (‘To The Brim’, ‘Mermaid’), le musicien n’hésite pas à croiser les genres, à l’instar de l’excellent ‘Cuddy Toy’ où il démontre tout son talent de composition dans cette chanson à tiroirs aux cassures rythmiques incessantes.
Et surtout Julien Bitoun ne tire jamais la couverture à lui, d’une part en mettant son excellent jeu de guitare exclusivement au service des morceaux, avec des solos le plus souvent courts et percutants, d’autre part en laissant s’exprimer ses camarades de The Angels, le bassiste Paul Iron au chant et à la composition sur le psychédélique ‘Mermaid’ et la batteuse Swanny Elzingre au chant sur le très groovy ‘Wind At My Back’.
"Little Ones" est un album attachant et d’une grande sincérité, composé avec soin pendant les confinements de 2020 et enregistré presque exclusivement dans les conditions du live, dans l’esprit des albums des années 60 et 70 dont il revendique et assume la filiation. Julien Bitoun s’y livre avec pudeur et, une fois de plus, cloue le bec brillamment à tous ceux qui pensent que les gens qui parlent de musique ne savent pas en composer.