La parution d’un album d’Arcade Fire, groupe canadien qui a quelque peu révolutionné le monde pop/rock à l’aube de ce millénaire, reste quoi qu’on en pense un événement en soi. Et "We", sixième album du groupe, ne déroge pas à la règle, explorant dans des textes quasi autobiographiques différents tourments tels que le repli sur soi, l’addiction numérique et autres sujets fortement amplifiés par les événements récents de ces deux dernières années de pandémie.
Dès l’entame, la basse rythmique nous entraîne au long d’une mélodie immédiatement accrocheuse, portée dans un premier temps par un piano simple mais lumineux. Petit à petit, les différents ingrédients font leur apparition avec une orchestration sobre mais soignée, avant que le titre ne prenne une tournure plus électro et dynamique pour finir de manière un peu abrupte. L’entame de la deuxième partie de 'Age of Anxiety' se révèle beaucoup plus introspective, dans un style qui évoque vaguement Mark Hollis, avant là encore de partir dans une farandole rythmée où l’alternance du chant masculin et féminin fait merveille.
Après ce premier chapitre en 4 parties, Arcade Fire nous emmène dans un voyage plus solennel ('End of the Empire'), fait de parties accompagnées de manière très sobre au piano ou à la guitare acoustique, mettant en valeur la voix limpide de Win Butler, et de passages limite symphoniques où l’orchestration soignée donne sa puissance à ce titre à la rythmique mi-tempo, dans un style que l’on qualifierait sans peine de pop progressive aux accents beatlesiens (n’entendrait-on pas des petits airs de 'Imagine' au tout début ?).
La véritable perle de "We" déboule ensuite sous la forme d’un diptyque ramenant vers la lumière pour une tentative de reconstruction ('The Lightning'), petit bijou pop racé lorgnant vers Coldplay tout en conservant la richesse et la subtilité des arrangements caractéristiques des Canadiens. Hymne totalement addictif, ce titre n’a pas fini de trotter dans la tête de l’auditeur et devrait déchaîner les foules en concert.
Le dernier morceau de bravoure de l’album, là encore en deux parties, voit la participation assez anecdotique de Peter Gabriel dans les chœurs ('Unconditional II') en soutien de Régine Chassagne, sur fond de consonances électro très marquées, avec percussions ethniques. Ce n'est pas forcément le style que l’on préfère chez Arcade Fire, mais cela démontre tout son éclectisme.
Le tout se termine par un titre réconciliateur, nous ('We') conviant tous à une rédemption teintée d’optimisme, décliné en mode acoustique voix/guitare sèche et dont la fin vaporeuse incite l’auditeur à reprendre l’ensemble à son tout début pour revivre une nouvelle fois ce voyage aux portes de la conscience, servi par une musique à nulle autre pareille.