L'amour de Jean-Pascal Boffo pour le progressif ne fait aucun doute. Premier artiste à avoir signé avec Musea qui défend depuis des années le genre, le musicien n'a jamais failli dans ses productions fournies à intervalles réguliers. Mais enfermer l'artiste dans ce style unique, même s'il est celui qui offre le plus de champs de liberté pour créer par son essence de n'obéir à aucun code, serait réducteur.
Non, Jean-Pascal Boffo est un artisan qui conçoit chaque nouvel album comme un travail différent du précédent, un peu comme une sorte d'exercice de style perpétuel à chaque réalisation, quitte à perdre en chemin quelques auditeurs. L'artiste ne fait pas "en fonction de...", il vogue au gré de ses envies tel un esthète de la musique. "In Spiral" obéit donc à ce seul fil rouge qui guide le guitariste : celui d'être différent à chaque sortie. Même s'il avait déjà injecté à sa musique des touches synthétiques et électroniques, ce nouvel album enfonce un peu plus le clou et occupera sans nul doute une place particulière dans sa discographie.
"In Spiral" témoigne de l'envie du guitariste d'apporter des éléments modernes dans ses compositions en usant de boucles sur lesquelles l'instrument à cordes divague. Ce travail rappelle celui de Craig Armstrong avec cette tendance romantico-nostalgique ('Childhood Dream') accentuée par l'apport d'une guitare langoureuse, rappelant le phrasé d'Andrew Latimer. Parfois, Jean-Pascal Boffo apporte un soin particulier à la dynamique avec des mélodies plus enjouées ('Cosmic Blossom') ou en lorgnant sur l'électro jazz ('Seed Of Light') voire le trip hop ('Inner World'). Si sur la longueur le disque manque quelque peu de contrastes pour gommer un sentiment de linéarité, le guitariste a le mérite de ne pas se perdre dans des divagations stériles en contenant son propos dans des titres de quatre minutes en moyenne. La fin de l'album se fait plus sombre, notamment avec 'Communication Breakdown' qui revêt des atours crimsoniens et de dark synth pas facile d'accès, bien contrebalancé par le titre suivant ('Space Time') avec notamment ses embruns floydiens plus directs.
S'il est un point où Jean-Pascal Boffo gagne son pari, c'est bien dans le fait d'avoir trouvé le parfait équilibre entre la musique organique et une certaine froideur numérique. "In Spiral" est un disque singulier dans son concept, qui a le mérite de confirmer un peu plus la liberté de création d'un musicien qui ne s'enferme pas dans des carcans.