Avec ses deux premiers opus studio, Supersonic Blues Machine avait assommé la concurrence. Le trio, régulièrement renforcé par des invités de marque, enchaînait les pépites d’un blues-rock rutilant auquel il ajoutait par-ci par-là quelques touches de soul, de funk voire de reggae. Et puis 2018 a vu Lance Lopez abandonner sa place de chanteur-guitariste au Britannique Kris Barras. Si le talent de ce dernier n’était pas remis en question, son chant plus voilé que celui de son prédécesseur laissait craindre une perte d’impact dans l’interprétation du super-trio. Heureusement, le live "Road Chronicles : Live ! " nous avait partiellement rassurés dès 2019. Après trois longues années d’attente, voici donc enfin la nouvelle offrande studio de la machine à blues supersonique attendue avec un mélange d’impatience et d’appréhension.
Comme pour confirmer sa solidité, le trio enchaîne trois titres sans invité sur lesquels il semble vouloir récapituler les éléments qui ont fait sa réputation. Blues, rock, groove et funk se mêlent en emportant tout sur leur passage, rappelant au passage à quel point sa paire rythmique est d’un niveau hors du commun. Mais si cette triplette introductive nous rassure autant sur la forme de ses auteurs que sur l’intégration de son nouveau frontman, elle laisse également apparaitre une colère sombre et rampante que les derniers évènements mondiaux expliquent clairement. L’évolution de notre société ne plait pas aux membres de Supersonic Blues Machine et leur musique devient ainsi plus mélancolique, ce qui convient d’ailleurs parfaitement au chant de Kris Barras.
Cependant, si Méphistophélès laisse traîner sa queue fourchue sur le reptilien ‘8 Ball Lucy’ et sur le bien-nommé ‘Devil At The Doorstep’ aussi envoûtant qu’inquiétant, le trio et ses invités ne sombrent pas pour autant dans une dépression profonde. Le martial ‘You And Me’ fait l’apologie du courage face aux épreuves avec le renfort de touches gospel, alors que ‘Do It Again’ montre les muscles et dégaine un riff accrocheur. Certains titres prennent le temps de s’étendre sur la durée et se font presque épiques (‘Coming Thru’, ‘Voodoo Nation’) pendant que d’autres déposent les armes et apportent apaisement (‘Is It All’) ou résilience (‘I Will Let Go’). Enfin, ‘All Our Love’ clôture ce nouveau voyage empli d’émotions de toutes sortes sur une note lumineuse et optimiste en nous rappelant que l’amour est peut-être la meilleure solution à la plupart de nos problèmes.
La richesse de cet opus ne permet pas d’en aborder tous les détails en une première écoute qui ne suffira pas pour tout découvrir. En revanche, ce "Voodoo Nation" risque fortement d'envoûter un peu plus après chaque passage en hypnotisant par sa variété, sa finesse et sa profondeur. En apportant quelques modifications à sa formule et en restant ancré dans la réalité de notre monde, Supersonic Blues Machine confirme son talent hors norme, comme sa capacité à évoluer, et permet l’intégration de son nouveau frontman comme s’il avait toujours été présent. Attention, l’addiction guette et vous risquez de ne plus pouvoir vous empêcher de remettre régulièrement cet opus sur vos platines. Vous êtes prévenus !