Troisième album pour le groupe polonais Turquoise, et si la pochette reste dans le même esprit féérique que la précédente, on assiste à un changement de chanteuse, Agnieszka Dudek, qui officiait en polonais (on dit polonophone ?) étant remplacée par Martyna Srocka, qui chante en anglais (anglophone, donc).
Dans l’esprit, le groupe évolue dans un registre FM maquillé néo-progressif : les titres courts s’appuient sur tous les ingrédients (d’aucuns diront les clichés) du genre : pas d’agressivité, des claviers bien planants et une rythmique un peu dopée pour épicer le tout.
Il y a deux façons de noter cet album : la première consiste à dire qu’on a affaire à un produit fort agréable, ne choquant pas les oreilles, consensuel, permettant de passer un charmant moment (mais court : à peine 36 minutes) en compagnie d’une polonaise à la suave voix, on met 7 et on passe à autre chose. Ça fonctionne tant qu’on ne se place pas sur le plan progressif ...
La seconde méthode est plus sévère (et comme l’aura remarqué le lecteur attentif, c’est celle que j’ai employée). Si on se place du point de vue de l’auditeur de musiques progressives, on éprouvera à l’écoute de ce “Futura” un sentiment d’agacement. Turquoise reprend ici les méthodes et matériaux du néo-progressif cités plus haut, nous sommes donc bien dans l’ambiance désirée, avec toutefois les claviers réduits à la figuration, en simple acompagnement (ah, si, on entend le piano en solo pendant 10 secondes sur “Powerless” et 20 secondes dans “Scarecrow’s Dreams”), la guitare faisant tous les soli instrumentaux.
Concernant le chant, je ne suis pas persuadé que le passage du polonais à l’anglais, plus consensuel , soit une bonne chose. Martyna Srocka chante juste, vibratise comme il faut, fait valoir son joli filet de voix, mais manque cruellement de relief dans sa pratique de l’anglais, ce qui rend les vocaux bien anonymes.
Côté compositions, comme mentionné plus haut, on n’est pas dans le domaine du progressif, mais bien dans le classique couplet/refrain/instrumental, sans changement d’atmosphère ou de rythme à l’intérieur d’un titre.
Tous ces défauts aboutissent à ce que personnellement je suis amené à juger sévèrement : une standardisation - musique, orchestration et interprétation - très nuisible à l’image du progressif en général (et du néo-prog en particulier). Les détracteurs du genre - détracteurs dont je ne fais pas partie ! - peuvent ici s’en donner à cœur joie ! “Futura” souffre donc à mes yeux d’un défaut d’orientation qui ne peut que me contraindre à passer sa note en dessous de la moyenne.