On croyait avoir à peu près circonscrit l’univers du metal, délimité le périmètre des styles et des sous-catégories existantes, mais c’était bien mal connaître Periphery qui revient avec un septième album inventif et éclectique, le tout dans un genre qu’ils ont eux-mêmes inventé, quoiqu’un peu malgré eux. Rien que la composition du groupe est originale : un chanteur, un batteur et trois guitaristes, tous aussi talentueux les uns que les autres ! Periphery, "Faut reconnaître, c’est du brutal", dirait volontiers Bernard Blier (Raoul, "Les Tontons Flingueurs").
La question du genre revient invariablement dans monde de la musique, d’abord parce qu’il permet une nomenclature commune catégorisant les groupes, mais aussi parce qu’on aime en général s’identifier comme amateurs de rock, de rap, de variété, etc. Les plateformes de streaming proposant désormais dans les 100 millions de titres à l’écoute, des sous-catégories ont inévitablement été créées, ne serait-ce que pour aider l’auditeur à s’y retrouver. D’où l’avènement rien que dans le metal, du prog, du death, du black, du thrash… ou plus récemment du djent. Qu’on adore ou qu’on abhorre, il faut faire avec.
Alors... Djent ou pas Djent ? Lorsque la question "Pourquoi ce titre d’album ?" a été posée au fondateur de Periphery, Misha Mansoor, il a répondu avec amusement qu’il avait hâte de voir ce que ça donnerait dans les bases de données. Il n’y a donc rien de profond à comprendre et ce n'est pas un coup de gueule particulier contre cette étiquette dont le groupe est affublé mais un simple appel à prendre tout cela au second degré.
‘Wildfire’, le morceau qui ouvre le bal, est d’une sauvagerie chirurgicale. Du Djent pur jus comme si Periphery voulait consciemment semer le trouble dans les esprits d’entrée de jeu. Le morceau est un régal avec son riff énorme soutenu par la double pédale, des harmoniques bien choisies, une ambiance jazzy, des hurlements, un refrain accrocheur, un solo en tapping meshuggien, un plan au saxophone et des envolées de violons… Accrochez vos ceintures, Periphery vous entraine dans un voyage tumultueux.
Et quel voyage ! Periphery est un groupe de Metal enragé, assaisonnant toutes ses recettes d’embardées symphoniques, de thèmes de jeux vidéo (les membres sont tous gamers), de phases new wave et même d’ambiances de films épiques (écoutez le final de ‘Zagreus’). Les compositions se seraient pourtant contentées du minimum tant les prouesses techniques des musiciens et leur inventivité sont hors normes mais Periphery va encore plus loin en alternant phrasés alambiqués, chant hurlé et clair, et moments émouvants. La structure barrée de ‘Wax Wings’ et sa mise en place remarquable rappelle certes Polyphia, mais Periphery étant antérieur aux Texans, on ne peut pas leur reprocher de s’inspirer d’un style dont ils sont les précurseurs.
A titre d’illustration, ‘Silhouette’ offre un moment de répit atmosphérique inattendu mais bienvenu au milieu de l’album. Le temps de reprendre son souffle et repartir dans l’univers unique de Periphery. Le groupe l’avoue: "Djent is not a genre, it is a lifestyle". On vous prévient, si vous n'êtes pas encore Djent vous-même, il est possible que vous le deveniez après avoir écouté cet album.