Le producteur parisien Manu H a toujours été passionné de cold wave. Depuis très longtemps, il caresse l'idée de produire un album qui rendrait hommage aux héros de sa jeunesse : Ian Curtis, Robert Smith ou Siouxsie Sioux. La cinquantaine sonnante n'a pas été une crise mais plutôt un déclic qui l'a poussé à réaliser son rêve avec un premier EP, "Intimacy".
Plutôt que de créer un groupe de toutes pièces, Manu H a composé des démos et envoyé ses textes à des interprètes de la scène dark, qui étaient les plus à même de comprendre son projet. Il a retenu trois jeunes femmes, Ophelia (Saigon Blue Rain), Mareta Volodina et Liset Alea à qui il a laissé carte blanche pour écrire les paroles qui manquaient à sa musique, en leur donnant un angle d'attaque autour des thèmes de la distance et de la solitude.
'Bitch 16' démarre sur les chapeaux de roue avec un déluge de notes de guitare agressives qui menacent de nous engloutir à tout moment malgré un passage un peu plus apaisant. Une bonne entrée en matière qui permet à la fois de planter le décor et de nous donner une idée sur l'esthétique du projet, assez fidèle à la cold wave. On retrouve également le son bien particulier de bassistes comme Simon Gallup ou Peter Hook, lugubre et très organique ainsi qu'une batterie squelettique à la Stephen Morris sur 'Leaden Sky'. Malheureusement, 'Twilight', malgré son aspect hypnotique, épuise un peu cette veine. Toutefois, on trouve des escapades en ailleurs avec 'Reason To Rush' dont le son électro des claviers nous rappelle le Nine Inch Nails de 'Ringfinger'.
Les interprètes féminines citées plus haut semblent planer au-dessus d'une mer agitée avec grâce. Si Ophelia joue d'abord sur une gamme nerveuse sur les deux premiers morceaux, elle réussit à montrer toute l'étendue de sa palette vocale sur 'Leaden Sky'. La mystérieuse Marita Volodina se distingue sur le vénéneux 'Water Of Woes' avec son chant héroïque qui réussit à traverser le mur de son toxique formé par les claviers et la guitare. Sur 'Reason To Rush', Liset Alea semble se laisser aller au fil du courant avec un certain charme.
Le premier EP de Distance H respire le parfum de soufre de la cold wave avec un soupçon de dark. Si certaines pistes rendent plus qu'un hommage au genre avec une identité assez forte, d'autres sont un peu ligotées par leurs influences. Toutefois, l'album ne se fait pas plombant malgré son aspect de diamant noir de la mélancolie avec un final très réconfortant. Espérons que ce projet ne soit pas un one shot.