« Crossroad » fait partie de ces albums que l’on attend pas. Avec un nom de groupe passe-partout associé à un design de pochette un brin trop classique, rien ne pouvait laisser présager du contenu de cet opus. Avec cet album de tous les paradoxes, Apple Pie nous propose de savourer un habile mélange de genres et de références particulièrement inattendu.
Débutant sur quelques couplets intimistes alliant une guitare acoustique et un chant chaud, légèrement rocailleux et à la prononciation parfaite, Apple Pie nous fait entrer en douceur dans un morceau qui, sur un break, va nous entrainer dans un mariage musical improbable entre deux références du rock et du métal progressif, à savoir Spock’s Beard et Dream Theater. Morceau phare pour certains, plagiat éhonté pour d’autres, ce titre instrumental ne manquera pas, de toute façon, d’étonner par ses qualités : techniquement avec des musiciens parfaitement en place qui se rapprochent de leurs idoles et mélodiquement avec des plans progressifs qui ont déjà fait leurs preuves chez les groupes précités. Les envolées de guitare renvoient ainsi immanquablement à Petrucci, les claviers se remarquent par une dextérité et des interventions de piano toute rudessienne, enfin la rythmique ne pourra que faire penser au couple Myung/Portnoy.
Il faudra attendre le second titre pour constater que coté chant la première impression fut la bonne et qu’il faudra compter sur un organe vocal - faisant immanquablement penser à Neal Morse - source de nombreuses sensations. « Sunrise » se veut être dans la continuité de « The Begining » mais alterne cette fois passages calmes proches d’une ballade et passages bien heavy qui une fois de plus font référence (un peu trop) à Dream Theater.
Crossroad marque un tournant stylistique en allant lorgner vers un rock que ne renierait pas Spock’s Beard. Démarrant sur des claviers et une guitare groovy qui aurait pu apparaître dans un album d'Alias Eye et se finissant sur un hard-rock endiablé, ce titre finira de convaincre les plus rétissents qu’Apple Pie n’est pas un cover band.
Passons sur la très courte mais néanmoins superbe ballade « Nothing » et son saxophone libérateur pour nous intéresser à « Temptation ». Cette dernière va permettre à la formation de s’extirper de ses deux inspirations majeures un peu trop encombrantes – mais toute de même jouissives – pour proposer quelque chose d’un peu plus personnel. Cassure avec le reste de l’album, ce titre, construit sur une base funky avec des cuivres s’autorise un blues parfaitement amené en son milieu. Un régal…
J’arrêterai ici ma description titre par titre pour vous laisser découvrir seuls la seconde partie de cet album aux variations sans limite. Sachez seulement que vous y trouverez encore quelques surprises avec des incursions dans différents genres tels le gospel, le blues, le jazz voire même la pop.
Techniquement moins démonstratif que ses références, Apple Pie ne devrait ainsi pas avoir trop de mal à rallier à sa cause un public très disparate. Avec l'expérience, gageons que l'ombre de Dream Theater planera un peu moins sur les futures productions de cette formation et que son identité éclatera au grand jour...