Si la pandémie a sonné le glas de plusieurs groupes, elle a eu parfois le mérite d'en réveiller certains qui ont puisé dans cette situation les raisons d'un retour salvateur. C'est un peu le cas de The Silencers qui n'avait plus produit d'album studio depuis 19 ans, "Come" datant de 2004. Autant dire que Tool et Tears For Fears sont définitivement battus. "Silent Highway" signe donc le retour aux affaires du groupe de Jimme O'Neill. Les fans de The Silencers sont nombreux - en particulier les Français. Il faut dire que les liens tissés entre le groupe britannique (écossais), en particulier son fondateur, et la France (la Bretagne) sont importants.
Les racines de cette affection réciproque se trouvent certainement dans la volonté du groupe de livrer constamment des albums soignés où la mélodie et les arrangements classieux sont mis en avant. Né de cette volonté de ne plus rester encore plus longtemps silencieux, Jimme a voulu livrer un nouvel album auréolé d'une couleur plutôt positive et chaleureuse contrastant avec l'époque actuelle qui a tendance à se morfondre. Loin du marasme actuel, la musique faussement légère faite de folk, de rock, de synth pop parfois ('67 Overdrive') apporte un élan d'optimisme qui fait du bien.
Tout réside dans les détails, d'abord ceux de la pochette faite d'une autoroute noire qui trace un chemin bordé d'un décor coloré témoignant du fait que, si l'on regarde autour de nous, tout n'est peut-être pas aussi sombre qu'on souhaiterait nous le faire voir. Mais c'est surtout grâce aux arrangements des mélodies assez typées années 80 - débuts 90 que réside ce ressenti positif. Conçu comme un rappel à "A Letter From St Paul", "Silent Highway" se veut un brin nostalgique sans pour autant être passéiste. 'On High' par exemple rappelle les origines du groupe par son dépouillement qui réussit, par son air acoustique, à suggérer les grands espaces de la lande écossaise.
Les chansons piochent dans la pop accrocheuse, mais The Silencers va beaucoup plus loin en ouvrant ses horizons à la country, genre qui l'a toujours accompagné (le sublime 'Silent Highway'), voire aux longs développements le temps de conter une belle histoire que l'on imagine d'amour ('Windswept Girl' tout en progression avec son magnifique solo de guitare et une fin atmosphérique surprenante). Le groupe s'essaye même à l'électro dans le très réussi 'What Inna Name' très moderne dans son approche, voire au minimalisme dans 'Torchsong' où le piano se taille la part du lion pour un titre très émouvant.
"Silent Highway" est un disque qui prouve une nouvelle fois le talent de The Silencers pour offrir des pépites musicales auxquelles on a du mal à résister. Joyau de mélodies sophistiquées qui restent en tête, un peu à la Tears For Fears, Paul Simon ou The Beatles, ce nouvel album est l'une des plus belles sorties pop-rock-folk de cette année, à côté de laquelle il ne faut pas passer.