Il n’est pas toujours facile d’être « the next big thing ». Découvert en 2003 grâce à un premier album qui a fait son petit effet, Oceansize récidive avec Everyone Into Position en ayant parsemé au préalable une floppée de singles. Dire qu’ils étaient attendus au tournant, c’est comme se demander si Drucker avait du guano dans les oreilles quand il a prédit l’écrasante victoire de la blonde sur les caoutchouteux (mais néanmoins sympathiques) de Lordi. Les mancuniens ont ils donc mérités notre impatience ?
De la différence dans la continuité. C’est ce qui vient à l’esprit après une première écoute. Les grosses guitares sont (un peu) restées au placard, et à part sur le frénétique "A Homage To A Shame", l’ambiance est bien plus calme, plus posée, la recherche de la mélodie plus évidente.
On peut voir le groupe comme un gros melting pot de différentes influences (metal, rock indé, progressif etc.….), le malstrom d’idées dans chaque chanson interdisant toute référence direct à un groupe ou même un courant musical précis, même si la filiation avec Tool ou Porcupine Tree saute aux oreilles, et le trentenaire mélomane écrasera sa petite larme en repensant à My Bloody Valentine, Mogwaï et Ride. C’est la grande force d’Oceansize... Chaque morceau à son petit lot de surprises (l’épique Ornaments/last wrong), et nous amène souvent bien loin de là où vous pensiez arriver, comme un GPS hyper perfectionné qui partirait en sucette au premier carrefour. Rarement un nom aura été aussi bien choisi : un océan de possibilités sonores mis en œuvre par des musiciens chevronnés dont la culture musicale permet une approche radicalement différentes de l’œuvre.
Mais ce melange est aussi leur grande faiblesse. Le manque de cohésion se fait parfois cruellement sentir et un sentiment de trop plein musical pointe insidieusement le bout de son nez. A la première écoute, aucun morceau ne décolle vraiment du lot, à la deuxième on se demande combien de pistes il peut bien y avoir sur cet album. Les nombreuses couches sont appliquées avec une rare délicatesse, mais parfois c’est plus la truelle qui finit le boulot, confirmant que le mieux est malheureusement l’ennemi du bien. Cependant, rien que pour des petits éclairs de pur génie comme "Music For A Nurse" (essayez de ne pas contempler bêtement le plafond pendant la fantastique intro reprise dans une publicité d'orange) ou "You Can’t Keep A Bad Man Down", parfait exemple de foisonnement mélodique complètement maîtrisé, Everyone Into Position se taillera une place méritée dans votre cédéthèque suédoise en kit.
Du bien bel ouvrage donc, un peu handicapé par sa boulimie de créativité, qui, pour peu que l’on prenne le temps de bien tout digérer, nous emmène hors des chemins de traverses, pour finalement nous lâcher la main, afin de mieux s’y perdre.