En deux œuvres éponymes, Dirty Honey s’est positionné comme l’un des groupes les plus crédibles en matière de relève des légendes du classic rock. Bien que restant encore dans l’ombre de Greta Van Fleet, le quatuor de Los Angeles représente néanmoins une parfaite alternative pour les amateurs du genre souffrant d’une certaine intolérance aux performances vocales de Josh Kiszka. Alors que cette caractéristique du gang du Michigan semble focaliser les critiques, l’opportunité de s’imposer comme son plus grand concurrent se présente donc aux Californiens qui proposent leur nouvelle offrande discographique pour laquelle la production a une nouvelle fois été confiée à Nick DiDia.
Nous noterons cependant un premier changement dans le line-up avec le départ du talentueux Corey Coverstone remplacé par Jaydon Bean. Alors que la qualité et l’inventivité de la section rythmique représentait un des points forts de Dirty Honey, voici qui pourrait en inquiéter certains. C’est également le cas de la durée de l’album qui s’étire cette fois sur trois quarts d’heures alors que le gang de Marc LaBelle et John Notto tirait également sa force de la concentration de ses propos. Mais que tout le monde se rassure, ces inquiétudes sont rapidement balayées dès la première écoute de ce "Can’t Find The Brakes" qui enchaîne une nouvelle fois les compositions d’une variété et d’une efficacité redoutables. Tout juste noterons-nous que les ballades sont cette fois présentes au nombre de trois. Heureusement, leurs différentes approches évitent un sentiment de redite. Que cela soit la bluesy ‘Roam’ au solo poignant, la folk et délicate ‘Coming Home (Ballad Of The Shire)’ avec ses effluves zeppeliniennes ou l’envoûtant mid-tempo ‘You Make It All Right’ sur lequel plane l’ombre des Eagles, chacune d’elle est captivante et bénéficie d’une émouvante interprétation de la part de Marc LaBelle.
Le chanteur est une nouvelle fois éblouissant et sa complémentarité avec le travail guitaristique de John Notto participe de la marque de fabrique de cette formation qui confirme sa forte personnalité. Comme pour les précédents albums, le jeu de la recherche des influences sera incontournable mais la force de Dirty Honey est d’avoir su les marier pour se forger une identité propre et affirmée. Encore plus root que ses prédécesseurs, "Can’t Find The Brakes" a également renforcé la place d’un groove à vous déboiter différentes articulations. Les meilleurs exemples en sont le single ‘Won’t Take Me Alive’, funky et teigneux, un ‘Dirty Mind’ reptilien jouant sur l’alternance des tempi ou un ‘Satisfied’ naviguant au sein d’émanations dignes de Tesla et d’Aerosmith. Le direct et hyper efficace ‘Ride On’ vient rappeler qu’AC/DC fait également partie des ascendants du quatuor, alors que ‘Rebel Son’ clôture le voyage en ouvrant de nouveaux horizons. Sur près de sept minutes, ce titre offre une montée en intensité toute en maîtrise pour captiver jusqu’à l’explosion finale d’une cavalcade instrumentale emblématique des plus grands monuments du rock sudiste.
Nous voici donc en présence d’une nouvelle confirmation de l’aveuglant talent de Dirty Honey qui continue à monter en puissance et à imposer son classic rock respectueux des légendes du genre tout en étant fort d’une identité affirmée. Le risque existe néanmoins que nous nous retrouvions bientôt à court de mots pour insister sur l’importance que cette formation va continuer à prendre au sein du mouvement revival dont elle représente désormais l’un des plus rutilants étendards. En cette période hivernale, "Can’t Find The Brakes" est l'un des meilleurs remèdes au froid et à la grisaille et chassera sans ménagement tout risque de baisse de moral.