Les sept musiciens de Dronte proposent une musique mariant instruments acoustiques, passages planants, pointes jazz, variations électro, dissonances et autres expérimentations. La formation a produit deux albums : “Quelque part entre la guerre et la lâcheté” bien accueilli, parfois qualifié de chef-d’œuvre et “Dés - Astres”, un split album réunissant à leurs côtés Royal McBee Corporation et Grind-O-Matic. Quelques années passées, voici “La Bête”, un quatre titres troublant et étrange.
L'Ep comporte deux titres originaux et leurs versions dépouillées de paroles. Les instruments acoustiques sont le cœur de la musique, même si déjà un orage menace avec des rythmes variant entre douceur et terreur, basse claquante, voix d'abord théâtrale qui gronde comme une bête ou des couleurs jazz acides qui augmentent l'inconfort. La six-cordes boucle, virevolte et développe un rythme lancinant qui titille les oreilles (‘Révolution’) ou distille d'abord des arpèges évanescents puis impose un rythme de plomb lorsque la voix expulse sa rage (‘Perspective’). En équilibre instable entre colère et douceur, le groupe vacille sur le fil du rasoir, change, va ou on ne l'attend pas et semble insaisissable. Les chansons affichent une fausse légèreté, inquiétantes et étonnantes. La force du disque est donc de jouer avec les contrastes : entre douceur acoustique, dissonances jazz, rythmique paisible et lourdeur metallique.
Dronte est un groupe insaisissable et inclassable, sa musique difficile d’accès l’est tout autant. Un Ep difficile à apprivoiser qui se mérite car point de mélodies évidentes ou des structures classiques auxquelles se raccrocher. Il manque à cet Ep des mélodies rassurantes, même si “La Bête” est un disque intéressant, froid et mystérieux, au charme certain.