Vingt et un ans après "4life", Silmarils fait son retour. Si le nom du groupe ne vous dit plus grand-chose, des titres comme 'Va y avoir du Sport' ou 'Cours Vite' vous rappelleront sûrement à leur bon souvenir. Silmarils fut l’un des pionniers de la fusion rap/rock alternatif, peut-être même un peu en avance sur son temps, enchaînant les albums et les tournées. Un tempo qui a pu peser dans la longue pause que le groupe s’est imposé, alors que leurs thèmes engagés résonnaient pourtant avec force dans une époque où les voix contestataires du rock avaient plus de visibilité.

En 2024, le contexte n’a pas vraiment changé, bien au contraire. La société semble vaciller toujours plus au bord du précipice, tirée par des enjeux sociaux, économiques, environnementaux et même de guerre. Un pas de plus, et c’est le grand saut. Autant de préoccupations qui semblent avoir réveillé Silmarils. Dans "Apocalypto", on retrouve la recette explosive qui avait déjà fait leur succès, mais avec une intensité renouvelée et des contrastes encore plus aiguisés.

Dès l’ouverture avec 'Welcome to America', l’album plonge dans une ambiance résolument 1990’s, mais teintée de nuances plus sombres et d’une profondeur insoupçonnée. Silmarils accentue ici les écarts stylistiques : des riffs métalliques, tranchants comme des lames, dialoguent avec des sections plus mélodiques. Le groupe est toujours influencé par l'énergie de la Mano Negra, mais il va plus loin en alternant des morceaux énergiques aux rythmiques rap, percutants et nerveux, et des passages plus lents et réfléchis. 'Tu ne nous Mérites Pas' mêle un flow intense à des paroles incisives, tandis que des morceaux comme 'Au Commencement' apaisent légèrement l’ambiance avec une approche hip-hop plus posée et un solo de guitare réussi en guise de bouquet final.

Cette alternance entre agressivité et sensibilité donne à l’album une palette riche et nuancée : 'Me Demande Pas' s’aventure dans des sonorités presque atmosphériques, tandis que 'Oublie-Moi' revient avec une énergie brute et dévastatrice. Cette variété dans les textures permet de maintenir l’auditeur en alerte, chaque morceau étant comme une nouvelle étape d’un parcours, où se mêlent rage, introspection et une envie de faire bouger les consciences. Les contrastes sont habilement dosés et les paroles percutantes, comme un reflet de la dualité du monde actuel : à la fois une envie de changement et une lutte contre la brutalité des réalités sociales.

Avec "Apocalypto", Silmarils prouve que, même après vingt ans d’absence, leur voix contestataire n’a rien perdu de sa pertinence. Ce retour est un manifeste de leur engagement inébranlable. Le groupe réapparaît non seulement pour célébrer ce qu’il a accompli dans le passé, mais surtout pour rappeler que la musique a encore aujourd’hui un rôle crucial à jouer. Dans une époque où les voix contestataires sont souvent étouffées par le tumulte médiatique, Silmarils montre qu’ils sont toujours présents, prêts à crier les vérités que d’autres taisent. Leur album vient briser le silence et rappeler que l’art peut encore être un outil de résistance, une façon d'éveiller les consciences face à une époque incertaine qui a tendance à vouloir les éteindre.