Si on vous dit Danemark, vous répondez ? La bière Carlsberg, les Stimorols, Lars Ulrich, la petite sirène, la pilule qui fait maigrir du laboratoire Novo Nordisk, Lars Von Trier, le Bluetooth pour les historiens-geeks, Myrkur pour les amateurs de Black Metal... Alors, on s’essouffle ? Si vous séchez sur les célébrités, les marques ou les faits marquants au Danemark, ce n’est pas parce qu’il n’y a rien d’intéressant, c’est justement le contraire. Le World Happiness Report de l’ONU a classé les Danois parmi les peuples les plus heureux au monde. Et lorsqu’on est heureux, on n’a rien à prouver, à convaincre ou à dépasser. Résultat : on ne fait pas parler et on a la paix. L’un des grands mensonges de notre société est de nous faire croire qu’il faut être visible, connu, avoir des likes et des followers pour être heureux, mais c’est paradoxalement l’inverse. Les Danois l’ont compris depuis longtemps, et ce n’est pas Iotunn qui dira le contraire.
Iotunn est un groupe de Copenhague qui a dix ans d’existence et (seulement) deux albums à son actif. Le petit dernier, "Kinship" corrobore ce qui vient d’être décrit, Jón Aldará, le chanteur, expliquant que dans la vie tout est lié, tout a un impact et que chacun d’entre nous a la mission de trouver sa propre voie pour renouer avec son soi profond. Le sujet de la causalité est central tout au long de l’album dans lequel il est constamment question de conséquence de ses choix et d’équilibre entre vie matérielle et spirituelle. Loin d’être perché, "Kinship" explore ce qui est à la portée de chacun pour atteindre le bonheur, pile à la frontière du bien/mal, de la lumière/obscurité, de l’esprit/corps, de la création/destruction…
L’album est un petit bijou de puissance, en équilibre constant entre le mélodique, la technique, la brutalité et l’atmosphérique. Les morceaux sont très travaillés, et au fil de l'album on comprend pourquoi Iotunn a pris son temps pour sortir son disque. En effet, si les Danois jouent une musique complexe aux interstices du metal progressif et du death mélodique, on ne se sent jamais enfermé dans les méandres pessimistes des styles, le groupe nous ramenant toujours à la surface après nous avoir fait goûter à l’angoisse des ténèbres. Au passage, on appréciera l'aisance d'Iotunn aussi bien dans les tréfonds du death metal que dans les envolées naïves du rock.
'Iridescent Way' est une jolie balade aux réminiscences de Metallica, mais sans le biais commercial. Le morceau sert davantage le suivant 'Earth to Sky', mix de death et de power metal rondement mené, entraînant l’auditeur dans les ténèbres du death metal pour mieux le ramener sur un refrain gai et entraînant dès le phrasé suivant.
Le final 'The Anguished Ethereal' est sans doute la partie la plus épique de l’album. Onze minutes de voyage émouvant aux confins de ce que Iotunn sait faire de mieux, et qui porte résolument l’album à son firmament. Les riffs sont si inspirés et accrocheurs qu’on se prend à encore les entonner une fois l’album terminé. Ce morceau final est une petite merveille pourvu que vous restiez concentrés durant les onze minutes qu'elle dure.
Inutile d'en dire plus. "Kinship" est une magnifique découverte à ne pas manquer, surtout si l'on cherche l’éveil spirituel et musical...