MOTHER OF MILLIONS: Magna Mater (METAL PROGRESSIF) : avis / chronique à lire sur Music Waves

Mother of Millions revient en 2024 avec "Magna Mater", un album lourd de sens et de puissance émotionnelle. Après la tragédie qui a frappé le groupe en 2019 avec la perte de leur claviériste Makis Tsamkosoglou, le groupe a décidé de poursuivre -sans le remplacer- optant pour un son épuré mais toujours aussi profond. Sorti sous le label ViciSolum, "Magna Mater" déploie neuf titres d'un rock progressif moderne teinté de metal, un voyage à travers des atmosphères denses et méditatives, soutenu par une instrumentation habile et des mélodies empreintes de tristesse et de résilience.

L'album s'ouvre avec 'Inside', un morceau aux riffs lourds et saccadés. L'intensité des guitares de Kostas Konstantinidis et les lignes de basse de Panos Priftis définissent le caractère sombre et complexe de cette ouverture, mais l’approche reste très proche de celle des albums précédents, notamment "Sigma" et "Artifacts". Si bien que même si l’ensemble reste efficace, l’impact reste limité par des instrumentations trop linéaires... Les lignes de chant de George Prokopiou, tour à tour calmes et déchirantes, donnent vie à cette lutte intérieure, rappelant les nuances émotionnelles de groupes comme Leprous ou Poem, avec lesquels Mother of Millions partage un goût pour les montées en tension progressive et les climax puissants.

Le morceau éponyme marque une transition vers des ambiances plus aériennes et introspectives grâce à l’ajout de voix féminines invitées (Antonia Mavronikola) qui enrichissent l’atmosphère. Ici, la batterie de George Boukaouris alterne entre des rythmes doux et des frappes martelantes, créant un contraste avec les nappes de clavier mélancoliques, qui rappellent l’approche atmosphérique de The Ocean ou Riverside.

Placés au coeur de l'album, ‘Liminal’ et ‘The Line’ montrent l’influence de la scène post-rock et shoegaze sur le groupe qui déploie des synthés brumeux et des sections rythmiques groovy. Dans ‘The Line’, les claviers prennent une dimension cinématographique, insufflant une grandeur qui rappelle les textures épiques de Cult of Luna, tout en restant fidèle à la sensibilité propre de Mother of Millions. Malgré cela, même ici, l’équilibre entre instrumentation et voix reste perfectible, laissant Prokopiou porter presque seul l’impact émotionnel.

Le véritable tournant arrive avec ‘Irae’. Ce titre se distingue par sa montée en puissance progressive, alternant douceur et brutalité avec un aplomb remarquable. Pour la première fois, la voix de Prokopiou explore des registres plus rugueux, frôlant le scream qui ouvre le champ à des émotions crues qui auraient pu enrichir tout l’album. Ce titre -l'un des plus captivants de l'album- fait écho aux œuvres plus audacieuses de Katatonia et Anathema. Ce moment cathartique est suivi de ‘Space’, une conclusion plus douce et introspective, où l’accompagnement instrumental offre enfin à Prokopiou l’espace nécessaire pour briller pleinement…

Malgré ses qualités, "Magna Mater" reste en deçà des attentes en matière d’innovation. L’album met en avant des émotions sincères et une maîtrise technique indéniable mais peine à se démarquer des schémas déjà explorés par le groupe dans sa discographie passée. L’absence de screams plus appuyés ou de moments véritablement audacieux empêche l’album d’exploiter tout son potentiel. Bien que compréhensible après une période de reconstruction, ce choix de prudence limite l’impact général, d’autant que certains titres montrent que les Grecs ont encore les capacités de surprendre et d’aller plus loin.

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