Sur ce premier album solo, Steen Grontved navigue dans des eaux jazz-rock très conventionnelles fortement typées eighties et ses enluminures papier glacé. De la production, en passant par les sons de claviers et les guitares estampillées Rockman, « Night Vision Goggles » fleure bon -ou pas- la décennie « frime/clean attitude ». En effet, dans ce CD, l'ambiance est au lustre, à l'impeccable et au démonstratif. Mais cela se paie par une certaine froideur de l'ensemble même si certains morceaux ne déméritent pas grâce à leur dynamisme et quelques trouvailles mélodiques plutôt agréables comme en témoignent quelques titres comme « Home Planet » ou « Timber ».
Reste que le sieur Grontved (à mes souhaits) sait tricoter du manche avec habileté: on notera ça et là des références évidentes à Satriani ( « Run ») qui restent dominantes dans le jeu du danois, une maîtrise agréable de l'acoustique et une capacité à dispenser des mélodies sinon originales, au moins prenantes. Ainsi, on ne se retournera point d'extase devant les arrangements très passe-partout dans le monde du jazz-rock... Ce style a évolué durant les vingt dernières années, ce qui semble n'avoir pas effleuré notre six-cordiste: cet album sonne un peu daté, comme sur « The Worm », même si il n'hésite pas à parfois piocher vers l'Amérique du Sud pour diversifier son vocabulaire musical (« What Mango? »). Pour peu que l'on soit indulgent, ça ne posera pas de problèmes... Mais il ne faut pas oublier que le genre musical abordé est très exigent en terme de maîtrise instrumentale -là, rien à redire, c'est impeccable- et de capacité à se renouveler et à faire avancer le schmilblick... C’est sur ce point que l’on peut coincer un peu tant la prise de risque inhérente au jazz-fusion n'est guère présente.
L'ambiance générale, quant à elle, est à une certaine accalmie: le ton dominant est plutôt optimiste, serein, parfois contemplatif -adulte?- ce qui n'est pas pour déplaire à une époque où la fusion se radicalise un peu en mettant l'accent sur des tempos rageurs et des guitares très mordantes.
En résumé, voici donc un disque agréable sans être surprenant ni révolutionnaire, fortement imprégné d'ambiances un peu surannées tirant parfois vers le New-Age. Teigneux : s'abstenir.