Après "Great !", qui opérait un virage décisif vers un son plus moderne et plus dense, Visavis ne ralentit pas : il appuie sur l’accélérateur et file droit devant. "The Art of Collapse", nouveau chapitre de sa mue entamée avec "War Machine", est un EP court mais percutant, qui agit comme une secousse. Plus question ici de tempérer la tension ou de dissimuler les angles : chaque titre frappe, cogne, et laisse des traces.
Le son s’est épaissi, alourdi, enfoncé dans des textures proches du sludge ou du metal industriel, tout en conservant une dynamique rock immédiate. Les guitares raclent, les machines grésillent, les voix s’entrechoquent. Dès l’ouverture avec 'We Don’t Care', la posture est claire : refus des conventions, refus du compromis, refus du silence. Visavis signe ici un manifeste brut, rugueux, mais jamais brouillon. Derrière l’agressivité frontale, chaque arrangement est pensé, chaque break sculpté avec soin.
'The Story Ends', plus contrasté, dévoile une facette plus nuancée du groupe. L’équilibre entre tension et retenue y est tenu sur un fil, révélant une maîtrise nouvelle dans l’architecture des morceaux. Ce jeu sur les dynamiques, déjà esquissé sur "Great !", trouve ici une pleine maturité. Mention spéciale aussi au morceau-titre, 'The Art of Collapse', qui condense en moins de quatre minutes toute la noirceur de cet opus, dans une ambiance poisseuse et électrisante, où les voix se croisent et se relaient sans jamais se neutraliser.
La force de cet EP réside dans sa concision. Aucun titre de trop, aucune idée diluée : Visavis concentre sa charge en six morceaux qui fonctionnent à la fois de manière autonome et comme un tout. On sent le travail de groupe rodé, précis, avec une production volontairement rugueuse mais solide, qui capture bien l’urgence presque live de ces compositions. Pas d’artifice, pas de surproduction : juste l’essentiel, taillé pour percuter aussi bien en studio que sur scène.
Avec "The Art of Collapse", Visavis ne cherche plus à séduire : il impose. Le groupe affirme ici son identité nouvelle, plus ancrée dans le metal, plus sombre, plus radicale aussi. S’il conserve encore les traces de ses racines punk et rock, c’est pour mieux les tordre à sa manière. Cette courte durée n’empêche pas une vraie densité musicale, et surtout, une cohérence qui en dit long sur la direction prise. On sort de l’écoute un peu sonné, un peu stimulé, et avec l’envie d’en entendre plus. Pas de doute : Visavis est en pleine réinvention. Et "The Art of Collapse" en est la preuve vivante, rageuse, implacable.