A peine plus d’un an après « Synchestra », quelques mois avec « The New Black » sous la bannière Strapping Young Lad et surtout après les propos tenus par un Devin Townsend visiblement usé qui laissait entendre qu’il voulait prendre du recul, le boulimique schizophrène rassure ses fans en poursuivant son rythme effréné avec son nouveau concept vraisemblablement le plus improbable jamais produit par le canadien. Le maître, tel un ermite, a effectué un vrai travail de titan en se chargeant de tout sur ce nouvel opus jusqu’à la batterie avec l’utilisation du programme « Drumkit From Hell » éprouvé par Meshuggah sur « Catch 33 ». Et à l’écoute du résultat, les batteurs ont bien du souci à se faire tant le mimétisme est poussé à son paroxysme…
La galette débute par « ZTO »… Fond musical comparable à une marche militaire spatiale sur lequel Ziltoïd le personnage central pose la trame du thème délirant qui s’ouvre à nous !
Ziltoïd est un extraterrestre qui, au détour de son périple intergalactique et inter dimensionnel, découvre une boisson dont il ne peut plus se passer : le café… Tant et si bien qu’il menace les pauvres terriens que nous sommes si nous n’étanchons pas sa soif… Au fur et à mesure de l’avancée de cet opéra métal et au gré des rencontres du héros, ce dernier se rendra compte de sa condition de marionnette et qu’il n’est que le fruit de l’imagination fertile d’un serveur/rêveur…
Telles les marionnettes que nous sommes comme il est hurlé sur « Colour Your World », je vais me plier à l’exercice traditionnel de la description en arguant haut et fort que ce « Ziltoïd The Omniscient » est une parfaite compilation de la discographie de Devin Townsend que l’on pourrait résumer par la pièce maîtresse de 10 minutes qu’est « Colour Your World ». Ce dernier titre balaye toutes les voies musicales empruntées par le canadien ; du début ultra-heavy très marqué Strapping Young Lad, pour finir sur des thèmes atmosphériques à la « Ocean Machine » en passant par ceux très « Synchestra » avec un solo empreint d’un feeling proche d’un Steve Vai.
Dans le détail et chronologiquement, on sera marqué par « By Your Command » qui donne le ton avec un riff heavy introductif qui aurait sa place sur n’importe quel album de Strapping Young Lad et son break aux nappes éthérées toutes droites sorties de « Terria ». S’envient ensuite le magnifique et malheureusement trop court « Hyperdrive » - mon coup de cœur personnel - dans la veine des meilleurs titres métal aérien-pop d’« Accelerated Evolution » sur lequel les harmonies sont tout simplement merveilleuses. Se succèdent ensuite un « N9 » au final hallucinant que l’on croirait tiré de « Physicist » et le martial « Planet Smasher », heavy métal proche d’un Strapping Young Lad mêlant chant death et envolées lyriques lors des refrains...Un titre plutôt monocorde sauvé par son couplet mélodique… Enfin que dire de la clotûre atmosphérique, « The Greys », que le doux rêveur/serveur reprend sur « Tall Latte » avant de se faire vilipender par son boss lors d’une scène finale aux dialogues hilarants !
Si dans le fond, « Ziltoïd The Omniscient » ne diffère en rien de la recette éprouvée par Devin Townsend tant au niveau de son projet personnel que sur Strapping Young Lad, c’est au niveau de la forme que le canadien innove en nous offrant cet opéra métal totalement déjanté… Si effectivement il n’y a pas de réelle surprise musicale à l’écoute de ce nouvel opus, il n’en demeure pas moins que Devin Townsend nous offre une succession de joyaux ultra-catchy et une prestation vocale une fois de plus hors-norme, tantôt rageuse, tantôt ultra mélodieuse au gré des thèmes musicaux visités. « Ziltoïd The Omniscient » est une œuvre d’une incroyable richesse, sans réel temps mort contrairement à ces prédécesseurs, qui ne s’appréhendera qu’après plusieurs écoutes pour rapidement ne plus décoller de votre lecteur.