Chez Orbital Hotel, trio autrichien, tout semble naître d’un besoin viscéral de jouer, comme si chaque instant passé loin d’un instrument menaçait de dissoudre l’inspiration. “Missing Link” s’inscrit dans cette urgence de créer, d’enregistrer, de laisser une trace sonore avant qu’elle ne s’évapore. Rien d’artificiel ici : juste le plaisir de faire surgir la musique du silence, sans contrainte, sans plan préétabli.
C’est sans doute ce qui rend l’écoute si immédiate. Les guitares s’enlacent, se cherchent, se répondent dans un dialogue permanent où l’instinct domine la raison. Certaines pièces (‘Magma’) respirent une chaleur souterraine, presque organique, quand d’autres (‘The Storm’) explosent dans une spontanéité désarmante. On perçoit derrière ces contrastes une même pulsation intérieure : celle d’un groupe qui ne compose pas pour raconter, mais pour ressentir.
Cette démarche confère à l’album un charme hypnotique, planant, presque cosmique. Le son évoque une exploration continue, un regard tourné vers les étoiles. À mesure que les morceaux s’enchaînent, une forme d’équilibre fragile s’installe entre chaos et apaisement. Ainsi, ‘Exchange’ semble suspendu au-dessus du vide, dans une ascension lente et lumineuse, tandis que "Wavefront’ referme le voyage sur une sérénité presque liquide, comme une retombée après la tempête.
Pourtant, à force de spontanéité, le trio se heurte à ses propres limites : les formats courts laissent parfois entrevoir plus qu’ils ne dévoilent. Les idées affluent, s’entrechoquent, puis disparaissent avant d’avoir pleinement éclos. “Missing Link” en devient fascinant par sa sincérité, mais aussi frustrant par un sentiment d'inachèvement - un peu comme une esquisse de génie qu’on aurait figée trop tôt.
Et c’est peut-être là que réside tout son intérêt : dans cette tension entre l’envie de tout dire et la nécessité de s’arrêter avant d’en dire trop. Entre un rock instrumental accessible, presque contemplatif, et une liberté créatrice qui frôle l’improvisation pure, Orbital Hotel signe un disque à la fois libre, imparfait et profondément inspiré.