Né de la rencontre entre musiciens aguerris de la scène française et la voix lumineuse de Noura, Ultrapilot s’impose comme un projet à part, où la rigueur du rock progressif s’allie à la sensibilité d’une écriture pop élégante. Derrière cette aventure, on retrouve notamment le batteur Sylvain Collet (du collectif Encore Floyd), et le claviériste Frédéric Lamirault, (du groupe Les Yappas), deux artistes rompus à l’art de la composition précise et des atmosphères travaillées. Ensemble, ils donnent vie à "Odyssey", un premier album pensé comme un voyage sonore, entre héritage assumé et expression personnelle.
L’album s’ouvre sur 'Alone Pt.1', une courte introduction d’à peine plus d’une minute, qui pose le décor avec pudeur : quelques notes suspendues, un souffle, une promesse. Cette entrée en matière agit comme une porte ouverte sur la suite, avant que 'Alone Pt.2' n’en développe le thème avec plus d’ampleur et d’émotion. Dès lors, Ultrapilot installe son univers : des arrangements ciselés, un piano central, une voix qui évolue entre clarté et intensité. On pense à Alan Parsons ou Mike Oldfield, pour cette manière d’ériger des paysages sonores autour d’une voix féminine expressive, sans jamais céder à la démonstration.
Sur 'Whispers of Chance' ou 'Hopes and Fears', Noura impose une présence à la fois douce et affirmée, quelque part entre Tori Amos et Stevie Nicks (Fleetwood Mac). Les textures sont soignées, la production limpide, chaque instrument semblant dialoguer avec l’autre plutôt que de rivaliser. 'Pulses' agit comme un pivot, un morceau à la tension mesurée, presque cinématique, tandis que 'Humans' surprend par la présence d’une chorale d’enfants, conférant à l’ensemble une dimension plus universelle et presque spirituelle.
C’est dans cette seconde moitié que se dessine plus clairement l’influence de Pink Floyd, plus particulièrement celle du tandem Gilmour/Wright : un art de la nuance et du ressenti, où la lumière prévaut. Ici, la guitare ne cherche pas à briller mais à respirer, les claviers deviennent un espace, une respiration émotionnelle. Comme chez Wright, chaque accord semble pesé pour sa couleur, et comme chez Gilmour, chaque note de guitare vise le cœur plutôt que la virtuosité. Ultrapilot s’inscrit dans cette même logique : faire naître l’émotion par la justesse et la retenue, sans jamais rompre la sérénité du propos.
L’ombre bienveillante de Supertramp plane également, à travers la reprise habitée de 'Crime of the Century' et la construction mélodique évoquée dans 'Have You Heard', où la montée en intensité se fait avec élégance et naturel. Loin du simple exercice de style, Ultrapilot privilégie une écriture patiente et un sens de la forme. Chaque morceau s’emboîte dans l’ensemble avec une cohérence rare, portée par une production limpide. Dans la lignée d’un Mostly Autumn, 'Odyssey' réconcilie la densité du progressif et la clarté d’une pop moderne.
En définitive, Ultrapilot signe avec "Odyssey" un premier album d’une élégance tranquille, à la fois apaisé et ambitieux. Un disque qui prolonge l’esprit des grands bâtisseurs de sons - de David Gilmour à Alan Parsons, de Mike Oldfield à Roger Hodgson - avec cette conviction que la musique la plus touchante est celle qui ose la lumière, en espérant que le projet n'en reste pas à cette première offrande.