Dès ‘A Fractured Monologue’, le décor est posé : un chaos savamment orchestré, des ruptures rythmiques dans la lignée de Dream Theater, et une voix qui s’épuise autant qu’elle s’élève. On ne pénètre pas cet univers sans résistance : c’est dense, parfois étouffant, mais traversé par une forme de clarté qui donne tout son sens au voyage. Avec ‘Distant Lines’, le groupe trouve un équilibre plus fluide - comme si Porcupine Tree (période "In Abstentia") et Katatonia s’invitaient entre les interstices - une respiration qui n’efface jamais la tension de fond, mais y accentue les reliefs.

Le cœur de l’album repose sur un triptyque central : ‘Everdream’, ‘Submatrix’ et ‘Drenched’. Le premier avance sur un fil, oscillant entre mélancolie et explosion contenue ; ‘Submatrix’ délivre un solo incandescent qui fend le brouillard comme une éclaboussure de lumière dans un univers en noir et blanc ; et ‘Drenched’, plus posé, s’enrichit d’un saxophone presque spectral, comme un murmure de chaleur au milieu des ruines. Trois morceaux qui, ensemble, traduisent la dualité de “Mindfractures” : la tension et l’abandon, la mécanique et l’émotion.

Puis vient ‘Monochrome Visions’, pièce d’hypnose lente, construite sur des boucles répétitives et obsédantes. Le morceau semble tourner sur lui-même, étirant le temps jusqu’à l’épuisement, comme une méditation sombre avant l’orage. Et c’est ‘Beneath the Opaque Veil’ qui libère enfin la tempête : riffs massifs, alternances d’arpèges acoustiques et de grondements saturés - on pense ici au Opeth le plus introspectif, celui de "Damnation" ou "Ghost Reveries". L’album s’achève sur ‘The Farthest Window’, viscéral et incandescent. Le chant s’éraille, les guitares s’enflamment, et la batterie martèle jusqu’à l’épuisement. Ce dernier souffle agit comme une délivrance, un cri de lucidité avant le silence.