ANGE: Cunégonde (ROCK PROGRESSIF) : avis / chronique à lire sur Music Waves

Après plus de 50 années au service d'un groupe à nul autre pareil, Christian Décamps a tourné la page, transmettant le bébé à sa descendance, en l'occurrence son fiston Tristan qui se retrouve propulsé aux commandes d'une formation qui, dans sa forme actuelle, est en place depuis deux bonnes décennies. La transition s'effectue toutefois en douceur puisque, ses adieux à la scène étant consommés depuis le début de l'année 2025, le père reste toutefois bien présent sur ce nouvel album studio dont la conception s'est étalée sur cinq années, présence aussi bien dans l'élaboration des titres que leur interprétation où l'on retrouve sa voix rocailleuse sur quelques morceaux.

C'est cependant avec quelques interrogations légitimes que l'amateur du groupe voit poindre "Cunégonde" qui doit représenter peu ou prou le 25è album studio de la marque franc-comtoise. Les doutes vont rapidement être levés dès l'entame proposée par 'Diamant dans le Cœur' : patiemment construit, ce titre chanté par Tristan alterne couplets intimistes et chorus puissants soutenus par des riffs de guitare magiques. Loin de renier ses racines, Ange enchaîne avec un 'Fruits et Légumes' qui renvoie à la période de "Fou", ambiance club de jazz inclue, avant une évolution symphonique en mode ternaire conclue par un superbe solo de guitare. On profite de l'occasion pour souligner le magnifique travail de la basse en arrière-plan, la section rythmique se révélant comme à son habitude de très haut niveau tout au long de l'album.

Dans la lignée de leurs productions du XXIè siècle, les six musiciens varient les ambiances, entraînant l'auditeur dans cet univers si caractéristique, sans les excès d'emphase qu'il a pu y avoir sur certaines productions. Et quoi de mieux pour cela que de nous proposer 'Un Passage de Rêves', poésie chantée par Christian sur fond de claviers ambient ? Respiration idéale avant d'entamer la seconde moitié de l'album qui va apporter son lot de surprises.

C'est tout d'abord 'Prisonnier de l'Aube' qui offre une magnifique plage d'expression au lyrisme plein de feeling d'Hassan Hadji au bout d'une lente montée en puissance, avant un hommage à Ennio Morricone incorporant des sonorités de guitare que l'on croirait sorties du dernier Sergio Leone, installant une ambiance cinématographique de tout premier ordre. Et puis, et puis, LE sommet proposé par 'Quitter la Meute' qui sortira le fan transi nostalgique de la période 1970's du groupe de son confort habituel (pour son plus grand malheur peut-être) : titre le plus ambitieux et peut-être le moins accessible, cette plage de près de 7 minutes convie à la fois des gros riffs métalliques tout autant que des harmonies baroques, mais également des rythmiques aux breaks permanents, le tout porté par la voix rocailleuse du père, tel un dernier salut aux aficionados avant de tirer sa révérence, avant que le fiston ne reprenne définitivement l'antienne et un dernier chorus dantesque. Ultime (?) passage de témoin avant un 'Cunégonde' conclusif ouvrant la porte à un futur que l'on souhaite se prolonger le plus longtemps possible.

Foin des débats qui pullulent quand la figure de proue d'un groupe change de tête (Genesis, Marillion, Yes...), "Cunégonde" est à placer tout en haut des meilleures productions du XXIè siècle de Ange. Augurant d'un futur prometteur, cette nouvelle production s'inscrit avec brio dans l'héritage du trésor constitué jadis par l'association familiale Décamps.

ANGE

CUNÉGONDE

AUTRE LABEL

ROCK PROGRESSIF