Deux ans après « Motions Of Desire » dont l’éclat, brillant de mille feux, révélait au grand jour la naissance d’un groupe prometteur et interpellait la curiosité et l’intérêt de la critique musicale, la formation finlandaise de « Magic Pie » revient et nous délivre un second opus, intitulé « Circus Of Life ». Avouons-le sans ambages et brisons aussitôt le suspense ; cette nouvelle œuvre est une perle scintillante dans l’univers progressif, un bijou lumineux appelé à éveiller les sens de l'auditeur. A son écoute, nous voilà soudainement immergés dans le grand "cirque de notre vie", là où s’accouplent les différentes émotions qui nous gouvernent pour créer un spectacle majestueux au sein duquel la béatitude se mélange aux larmes, le bonheur fusionne avec la mélancolie, l’agressivité s’unit à la quiétude intérieure.
Les richesses de cet univers aux charmes sans fin sont multiples. Elles se retrouvent essentiellement à travers l’unification de différentes tendances qui, à première vue, pourraient se distinguer ou s’opposer. Aussi, au gré des sept titres de cet album, sommes-nous tour à tour plongés dans une atmosphère tantôt "seventies", tantôt "moderne", tantôt "hard-rock" et "métal mélodique", tantôt "pop harmonieuse" et "néo-progressive". La synthèse est magique, parfaitement interprétée, avec un talent réellement surprenant et débouche sur un tourbillon sonore aux couleurs arc-en-ciel somptueuses.
La lumière de cet album resplendit aussi à travers l’éclat de ses voix qui hantent solennellement son univers. « Magic Pie » réussit là où de nombreux groupes échouent, soit à fusionner un travail d’expérimentation instrumentale de grande qualité avec des parties vocales d’une intensité émotionnelle envoûtante. L’une des grandes forces de ce groupe est de posséder en son sein trois "lead vocals" parfaitement complémentaires et qui se superposent à merveille, amplifiant encore la diversité qui se dégage de son propos musical. Et puis, il y a aussi le scintillement qui émerge des cordes ensorcelantes de la guitare de Kim Stenberg, dont le jeu très personnel et le son unique, légèrement éloigné des influences extérieures parfois trop présentes chez de nombreux artistes, l’élève au rang des grands talents de la scène progressive actuelle.
La splendeur de cette œuvre brille également par l’excellence de ses titres. Aussi, après une bienvenue aux tons acoustiques, nous voilà possédés par une plage instrumentale qui met en évidence le croisement d’un orgue inspiré avec le rythme plus soutenu d’une guitare agressive. L'enchaînement de ces deux titres initiaux semble une métaphore des instants magiques et apaisés de notre enfance jusqu'aux premières séparations abruptes auxquelles notre âme fut confrontée. Cette alternance met volontairement nos perceptions en éveil afin de mieux accueillir la douceur planante du titre suivant, « What If ». Les voix de cette ballade envoûtante, mélangeant le "Chicago" de ses débuts aux slows du "hard-rock", épousent une guitare aux airs "Wilsonniens" subtils, puis se succèdent et s’assemblent pour former un tout d’une mélancolie divinement harmonieuse. « Trick Of The Mind » se présente comme une puissante pièce de rock progressif en quatre actes, un mariage entre "The Flower Kings" et "Dream Theater", et au sein de laquelle nous passons par tous les états d’âme; place aux variations, aux refrains grandiloquents, à la diversité, à la créativité: Epique ! Le très atmosphérique « The Clown » met en lumière le talent de Stenberg. Bouleversés et émus, nous nous accrochons à chacune des notes de son solo éblouissant. Les deux derniers titres, « Pointless Masquerade », aux réminiscences très "Spock’s Beard", et « Watching The Waters », axé sur les claviers de son concepteur Gilbert Marshall et submergé par une harmonica très seventies, prolongent ce moment de bonheur intense.
« Circus Of Life » est ainsi une œuvre magistrale, flirtant avec le génial, le sublime et l’envoûtant. Avec ce témoignage artistique de haute voltige, « Magic Pie » confirme toute l’excellence de son talent aux multiples facettes et nous livre un album magique qui, à l’image du « Fear Of A Blank Planet » de « Porcupine Tree », constitue l’une des sorties majeures de l’année 2007 et représente une valeur sûre amenée à rejoindre les grands classiques.