Waterclime est le dernier avatar des multiples projets d’Andreas Hedlund, alias Mr V. Cette célébrité du monde métal s’est frotté à presque tous les genres, du death métal (Masticator), au black métal (Cosmic Death), en touchant également au gothic métal (Havayoth) au thrash-métal (Fission) et au métal atmosphérique (Cronian) , tout en s’attardant un peu plus sur le folk-métal : Vargatron, Otyg, et surtout le plus connu de tous ses side-projects, Vintersorg.
On le voit, l’homme est prolifique ! La grosse différence qui caractérise le projet Waterclime (à l’origine, Waterfield), c’est qu’Hedlund quitte ici le style métal en ambitionnant de rejoindre le rock prog à tendance symphonique. Un pari particulièrement délicat, tant les univers sont différents, pour ne pas dire antinomiques.
Car ce CD (2è album de Waterclime après the Astral Factor en 2006), produit, mixé, masterisé et pour une grosse part interprété par Andreas Hedlund lui-même, est particulièrement révélateur de ce qui peut séparer les amateurs de métal et les amoureux de progressif pur. Les premiers sont férus de rendu technique, les seconds d’émotions mélodiques. Les deux mondes ne sont pas inconciliables, mais les groupes qui parviennent à fusionner les deux sont d’une exceptionnelle rareté. Waterclime ne rentre pas - du moins pas avec cet “Imaginative” - dans ce cercle très fermé.
Il est difficile de ranger “Imaginative” dans un style typique de rock progressif. Le genre est plus celui d’un AOR à tendance prog, assez nerveux mais sur des tempos assez uniformes : l’auditeur peut y entendre des réminiscences de Yes, mais loin du genre prog symphonique revendiqué, l’instrumentation restant très classique et les claviers, discrets. Des teintes folk sont perceptibles, mais il se dégage surtout une propension à laisser les instruments courir chacun de leur côté sur leur ligne mélodique, tendance qu’ont assez souvent les groupes métal pour étaler leur technique. Le rendu harmonique n’est dès lors pas évident, et malgré l’énergie mise à enrichir les partitions, on arrive paradoxalement à un résultat plutôt uniforme et, à mon goût personnel, assez plat et peu attachant (mais les aficionados de métal peuvent juger de façon diamétralement opposée).
Reste un produit hybride, qui me parait composé comme du métal (donc techniquement quasi-irréprochable), mais sans le son métal (entendez par là : malheureusement limité en amplitude sonore et instrumentale), assaisonné d’une batterie envahissante mais pas toujours à propos, et sans les lignes harmoniques qui pourraient attirer les amateurs de rock progressif. Quant au chanteur, le très renommé Mr. V ne me parait pas à sa place dans ce registre, où sa voix clairement mise en avant montre quelques limites, loin de l’assurance qu’elle possède dans ses productions métal où ses grunts et autres variations vocales impressionnaient. Ce point est probablement ce qui m’a le plus surpris - et déçu - lors de l’écoute d’Imaginative : la voix est très souvent forcée dans les aigus, et cela s’entend désagréablement.
Rappelons-le, cette “critique” (ici à préférer au terme “chronique”) est signée d’un amateur de prog (et même, pire, de néo-prog ... ). Je conçois donc comme tout à fait possible un jugement différent de la part des fans habituels d’Andreas Hedlund. Il me semble par contre que les mordus d’harmonies progressives ne seront guère attirés par cet essai qu’il trouveront peu attractif quoique techniquement bien réalisé.