Issu d'une scène post-grunge californienne très fertile à l'heure actuelle, 'Operator' n'en demeure pas moins une formation qui aurait dû en toute logique apparaître du côté de Seattle. Non pas que le style impose outre mesure des origines de cette ville, mais c'est surtout le fait de la parenté plus que marquée du groupe avec l'un des grands représentants du grunge.
Il était déjà question d'influences fleuretant avec le "trompe l'œil" chez certains groupes : 'Thessera' calque parfait de 'Pain Of Salvation' ou 'Negative Zone' qui s'était glissé le temps d'un éponyme dans la peau de 'Pink Floyd' ; les deux formations ayant d'ailleurs jouer ce rôle avec beaucoup de talent. Avec 'Operator', ce sont plutôt les albums de 'Soundgarden' (et par voie de conséquence 'Audioslave') ou encore le dernier "Carry On" de Chris Cornell qui vont souffrir de contrefaçon. Le mimétisme sera tel que le chant de Johnny Strong fera immédiatement pensé à Chris Cornell jusqu'à quelque fois faire parfaitement illusion. Au niveau des compositions, le choix s'est porté sur un retour aux sources du grunge, celui de "Badmotorfinger" relayées de façon dominante par des ballades rock parfois bluesy très proches du songwritting de Chris Cornell sur ses albums solo.
Qu'elles soient énervées ou mélodiques, les chansons accrochent très vite, reprisées par le fil de la modernité et solidement tenues par les lignes de guitares tantôt lourdes tantôt légères de Dorman Pantfoeder et Paul Phillips (ex-'Puddle Of Mudd') et par le chant rocailleux de Strong. L'ambiance se fait mélancolique sur les titres lents et calmes mais laisse la place aux envolés émotionnelles emportées par les mélopées alors devenues plus personnelles du frontman. A contrario, l'espace se réduit rendant plus compact l'ensemble lorsque le rythme s'échaude (le premier single "Soulcrusher", "What You Get" ou "Live Your Way") Les riffs simples mais efficaces participent à cette pesanteur mêlée d'agressivité.
Une impression évidente de déjà entendu ressort malheureusement de "Soulcrusher". L'empreinte du "Jardin des Sons" et de son charismatique leader est tenace sur les onze pistes. Mais n'est pas 'Soundgarden' qui veut. La facilité avec laquelle Cornell engendrait ses chef-d'œuvres n'est pas à la portée du premier groupe venu. D'autres parts, le cortège de formations actuelles proposant des thèmes musicaux proches ('Creed', 'Puddle Of Mudd',…) ne font que renforcer la sensation d'immobilisme et d'absence nette d'audace d 'Operator'.
Malgré tout, l'écoute reste agréable de bout en bout grâce à une production solide et des mélodies efficaces. Les adeptes du genre apprécieront de toute évidence mais les autres qui tendront une oreille curieuse ne devraient pas y trouver la richesse musicale que l'on est en droit d'espérer.