Mike Patton, en tant que stakhanoviste qui se respecte, est homme à offrir des albums d'une diversité manifeste avec une fréquence impressionnante. Rappelons que cet hyper-actif fut responsable des feus Faith No More et Mr Bungle, et désormais de Fantômas, Peeping Tom et de Tomahawk. Il collaborera également avec le norvégien Kaada, le groupe de rap new-yorkais The X-Ecutioners en passant par pléthore participations avec entre autres Björk, John Zorn, The Melvins…
Avec autant de projets différents, il faudra attendre quatre annnées après 'Mit Gas', second album de Tomahawk, pour qu'apparaisse enfin 'Anonymous'. Et si son frère cadet restait dans une veine proche de celle du répertoire de Faith No More, 'Anonymous' se démarque complètement en proposant une musique imprégnée du folklore amérindien, cherchant en quelque sorte à rendre hommage à la culture musicale de cette communauté, celle qui "a contribuée à créer cette musique mais dont l'Histoire ne parle pas" (dixit Tomahawk)
Les recherches menées en amont par Duane Denison (ex-Jesus Lizard) pendant une année ont visiblement porté leurs fruits. Les treize titres regorgent d'ambiances rappelant à la fois chants incantatoires, prières et danses traditionnels. L'atmosphère qui s'en dégage est mystérieuse ("Mescal Rite 2") tout autant qu'inquiétante ("Cradle Song") mais sait parfois se faire plus légère ("War Song", "Antelope Ceremony") L'effet rendu n'est pas le seul fait de l'apport emprunté aux rituels musicaux amérindiens. Les samples de Mike Patton et son chant profond ou véhément mais toujours irréprochable s'unissent parfaitement dans cette étude du folklore revisité et modernisé. Les guitares très présentes et les fûts de Jon Stanier (ex-Helmet) finissent d'apporter la sonorité ancrée dans un présent mais qui sait manifestement évoquer avec respect un certain passé.
S'il dénote dans la discographie de Tomahawk en tant que prétendant à la succession de Faith No More, 'Anonymous' reste un album dont l'attrait est celui de la curiosité, de l'audace dans l'expérimentation. Comme fréquemment chez Sir Patton, les antis et les pros se feront entendre mais il faut avouer que musicalement, l'album est très riche, salvateur et apportera la fraîcheur de 'California' de Mr Bungle ou de Peeping Tom. Il a par conséquent légitimement toute sa place dans le registre que l'on connaît varié et débridé du génial Mike Patton.