Près d’un an après la sortie d’Orchestrate, qui était le 6ème album de Michaël Harris, et seulement 9 mois après la sortie du premier album de son nouveau projet Thought Chamber, voici que ce talentueux six-cordiste nous revient avec son nouvel opus ‘Ego Decimation Profile’. En fait, cela n’est pas un nouvel album dans la mesure où c’est une réédition d’un album produit en 1996. Harris a ainsi voulu remettre cette production au goût du jour en remixant et remasterisant lui-même tout le matériel afin de palier les carences de production induites par les tendances qui dominaient le marché de l’époque.
L’apport de la nouvelle production est indéniable : on entend bien l’ensemble des instruments, avec une mention spéciale pour la batterie où les effets de charleston sortent impeccablement. Seule la guitare lead apparaît parfois en retrait, mais c’est une question de goût… C’est donc subjectif !
Dans les grandes lignes, le propos musical développé est du métal instrumental progressif mixant différentes influences ; du métal évidemment, pas mal de néo-classique, du prog à de multiples endroits, de la fusion, du jazz, du funk… Malgré quelques passages typés shred (je rappelle que les compositions datent des années 90 : on était en plein dedans), un soin tout particulier est apporté aux thèmes qui privilégient la mélodie à l’esbroufe, même si la maîtrise technique transpire de toute part. Il y a donc des titres relativement néo-classiques, joués à la manière d’un Cacophony ou d’un Michael Romeo. Il y a aussi des morceaux qui s’éloignent de cette trame principale et explorent d’autres styles en pratiquant davantage de mélanges, notamment en y intégrant des éléments de funk (plus particulièrement au niveau du jeu de basse qui met l’accent sur le slap) et de jazz : c’est notamment ce qu’il a essayé de faire plus récemment avec son nouveau groupe Thought Chamber.
Dans la dizaine de titres qui composent cette galette, on trouve principalement du speed tempo, mais aussi du mid et du slow. L’ensemble des morceaux sont bien évidemment très typés ‘guitar hero’, avec tantôt des sons privilégiant la superposition de couches de guitares, tantôt une guitare lead plus directe, moins fardée d’effets…
Parmi les titres qui se démarquent, l’ouverture se fait avec ‘Forewarning’, titre très symphonique et orchestré démarrant sur quelques arpèges acoustiques. Avec le recul, ce morceau laissait déjà présager à cette époque ce que Michaël Harris allait produire quelques années plus tard avec l’album ‘Orchestrate’ : un métal instrumental progressif axé sur des orchestrations symphoniques.
‘Vicous Uppercut’ emboîte le pas sur un territoire très speed métal : une bonne décharge d’adrénaline administrée par les oreilles. ‘Hair on E string’ est du même acabit. ‘Stratus Fear’ et ‘Grandscape’ sont quant à eux davantage mid tempo.
‘Pawn to King IV’ offre un petit interlude avec un thème médiéval aux accents baroques, joué à la manière d’un violon en taquinant le potard du volume, ou bien au moyen d’une pédale d’expression.
‘Freudian Trip’ met l’accent sur des tonalités funky et groovy avec un slap de basse relevé par un bon riff dégoulinant. ‘Julius Seizure’ reprend également des colorations funky à la basse mais convertit cela en délire jazzy vers la fin du titre. ‘Brainwarp’ explore aussi de manière très progressive de multiples changements de rythmes et d’ambiances en terminant sur une rythmique résolument heavy.
L’album se clôture ensuite sur un superbe morceau épique, le bien nommé ‘Terminus Epic’, caractèrisé par un feeling terrible et une mélodie de toute beauté ! C’est le morceau qui à mon goût vaut largement tout le reste de l’album : une introduction acoustique avec seulement trois notes qui déchirent et un thème super efficace avec un son de distorsion chaude et crémeuse à souhait. Un véritable régal !
Ce qui manquerait à cet album, ce serait peut-être un (ou plusieurs) titre purement acoustique : c’est que le bonhomme est également expert en la matière mais il se garde de nous le démontrer ici.
En conclusion, l’album est vraiment bon : plus on l’écoute, plus l'on s’imprègne des thèmes et des successions d’ambiances et de styles, même si le tout reste résolument fondu dans le métal ! Amateurs de technique guitaristique, amateurs de métal prog avec des pointes de néo-classique, de fusion et de funk : cet album est pour vous !