L’album par lequel le scandale arriva ? Il est amusant de constater qu’à propos du nouvel album de Radiohead, les critiques ont souvent eu tendance à évoquer davantage l’état de l’industrie du disque que l’œuvre proprement dite, ce qui n’est pas un mal après tout.
Petit rappel pour ceux qui débarqueraient d’une île déserte : il y a quelques mois, le groupe anglais se retrouvant sans maison de disques décida de proposer son nouvel album en téléchargement plus ou moins gratuit sur son site Internet (les internautes décidant de la somme à verser pour se procurer l’album). On imagine la tête des dirigeants des maisons de disques et des différents distributeurs voyant leur échapper une manne très lucrative. Radiohead avait également dit qu’il proposerait l’album dans un luxueux coffret regroupant 2 CD et 2 vinyls, l’objet, en raison de son prix, étant probablement destiné aux puristes et fans du groupe.
Avec cette histoire, le groupe est revenu sur le devant de la scène 4 ans après un « Hail to the thief » plutôt hermétique qui poursuivait l’expérimentation de « Kid A » et « Amnesiac ». Bonne nouvelle pour les amoureux de la pop romantique de « Ok computer », Radiohead revient avec un album plus dépouillé, plus accessible mais qui n’est pas pour autant simpliste, et c’est probablement là que résident la force et l’évidence d’ « In rainbows ».
L’album est également un ensemble hétéroclite de morceaux de différentes périodes (« Nude » issu des sessions d’ « OK computer ») et alterne les ambiances électrodynamiques (« Bodysnatchers ») avec des compositions lentes et désespérées (« All I need ») dont le groupe a le secret depuis quelques années. Du coup, on peut trouver que l’album manque d’unité mais force est de constater qu’une fois de plus Radiohead réussit la plupart du temps à nous piéger dans une toile musicale dont il est difficile de se défaire. En effet, comment rester insensible à la beauté du délicat « Reckoner », à la progression incendiaire de « Jigsaw falling into place » ou encore au final à combustion lente de « Videotape » ? Cette alchimie de rythmes électroniques, de guitares plus ou moins folk, de pianos délicats et de voix plaintives est sans conteste la marque de fabrique d’un groupe souvent copié mais rarement égalé.
Ceci étant dit, qu’en est-il des audiophiles qui ne disposent pas d’Internet ou de ceux qui souhaiteraient simplement se procurer l’album en CD avec livret et à un prix raisonnable ? La réponse a été trouvée il y a quelques jours puisque « In rainbows » est sorti finalement dans le commerce en édition simple à un prix tout à fait abordable. Radiohead, les rebelles de l’industrie musicale ? Probablement pas mais en tous cas de sacrés créateurs de beauté.