"Basse. Nom Féminin. Partie la plus grave d'un morceau de musique polyphonique." Si cette courte définition tirée d'un dictionnaire de poche ne vous donne pas satisfaction, jetez donc une oreille attentive au premier album de Bassinvaders. Vous aurez une idée plus concrète de la portée trop souvent sous-estimée de cet instrument.
Markus Grosskopf, bassiste et membre originel d'Helloween est l'initiateur de ce que l'on peut appeler un "hommage personnel à la basse". Extrémiste dans sa démarche et perfectioniste dans la création de son oeuvre, il n'a laissé de place qu'à deux autres instruments : la voix, et la batterie. Ni guitare, ni clavier, choeurs sporadiques et mixage minimaliste, ce n'est pas seulement un projet, c'est aussi un dogme.
Pour ceux qui l'entourent, adherer à ce concept pouvait s'averer périlleux, mais un bref regard sur le nombre de collaborateurs vous fera comprendre à quel point les musiciens ont le goût du risque. En dresser la liste exhaustive serait ici fastidieux (voir plus bas) mais disons simplement qu'ils sont tous talentueux et reconnus par leurs pairs.
Les 14 titres qui sillonent Hellbassbeaters ( dont un bonus track pour vos beaux yeux ) sont parfaitement homogènes car liés par la même ambition, mais gardent chacun leur propre indentité. Grosskopf se sert de la basse pour faire un tour d'horizon du métal (ou plutôt de sa vision du métal) réservant quelques surprises à ceux qui ne voient en lui que légereté et trivialité. Privilégiant les atmosphères sombres aux mélodies faciles il prend le parti de diviser ses auditeurs non sur le fond, mais sur la forme de son oeuvre.
La courte introduction connotée "indus" laisse en effet présager une rupture nette avec son travail pour Helloween. Bien entendu, les amateurs de heavy mélodique ne sont pas mis à l'écart : le refrain et la rythmique entraînante de "we live", le thème fédérateur de " empty memories" ou encore les solos epoustouflants de "boiling blood" ( sur lesquels planent l'ombre de la citrouille ) sont de nombreux atouts pour ceux qui aiment taper du pied. Mais ce n'est qu'une partie de l'iceberg, l'autre se voulant plus aggressive et torturée. Certains titres bruts, dépouillés voire mélancoliques rebuteront peut être et surprendront sûrement.
"Armageddon". Le titre parle de lui même. Trash, sans concessions, un jeu de batterie bluffant qui comble une absence totale de mélodie.
Le jeu de basse et les efforts de chaque virtuose laissent perplexe tant l'univers dans lequel ils prospèrent est sombre : "Romance in black", "Godless god" ou "Dead from the eyes down" satisferont à coup sûr les amateurs de trash ou de néo. Pour les autres...
Tel un drapeau blanc sur un champ de bataille, la paix est timidement représentée par le bonus track final et la reprise réussie d'Eagle fly free; une réussite car faire oublier les solos de guitare était un pari risqué.
On est libre ou non d'apprécier l'univers musical dans lequel s'est engoncé le projet et l'omniprésence de la basse y est peut être pour beaucoup. N'oubliez pas la définition qui introduit cette chronique. Un son grave, qui plus est, mis en valeur et porté à son paroxisme renforcera inévitablement la noirceur des titres joué en mode "métal". Mais le son est si beau et l'utilisation de l'instrument si professionnelle que l'on ne peut qu'applaudir ce qui, indiscutablement, constitue un tour de force.