Après la mise sur orbite de son dernier projet solo en 2006 (The D-Project), Stéphane Desbiens, progueux québécois multi-tâches (cf également ses participations dans Red Sand, Ere G. etc…) revient à ses premières amours en groupe, et nous livre avec ses acolytes de Sense un troisième album studio que d'aucuns attendaient avec impatience pour confirmer tout le talent entrevu sur le précédent opus, Out of Range.
Dès les premiers accords de The Sweater, le décor est planté : Sense nous propose ce qu'il sait faire de mieux, à savoir un rock progressif à l'ancienne, fortement inspiré par un Yes de bon acabit, avec de grosses colorations genesiennes. La basse est ronflante, les harmonies vocales rappellent Jon qui_vous_savez, et le symphonisme du morceau titre nous renvoie tout droit … vers Drama, seul album yessien sans la voix de son maître (!).
Qu'importe, nos québécois ont le sens de la conception solide, et s'arrêter à ces seules comparaisons serait bien réducteur par rapport au talent déployé par le quintet. En effet, non content de produire une musique abandonnée en ce 21è siècle par les deux dinosaures précités, Sense y ajoute une touche de modernisme en explorant d'autres univers dans lesquels nos deux références ne pourraient, compte tenu de leur pedigree, s'aventurer. Ainsi, Going Home se voit doté de deux minutes centrales très symboliques de cet état d'esprit : après un démarrage très jethro_tullien puis une partition plutôt jazzy, le groupe se permet une séquence de fusion métallique, avant de revenir à un progressif plus classique pour poursuivre et terminer ce morceau. Le même type de variations se retrouve également dans Aftermath, tandis que Stranger Coming Home lorgne franchement vers Camel, avant de se terminer dans un néo-prog jouissif.
Des titres longs permettant au groupe de développer ses idées (hormis le final de Going Home qui semble tronqué), des références bien assimilées et digérées : avec ce troisième album, Sense confirme tout son potentiel et vient placer la barre très haut. Going Home ravira tous les amateurs de progressif symphonique bien charpenté, permettant à Sense de pointer le bout de son nez dans le peloton de tête des groupes québécois de haute tenue.