Uncolored Wishes est un groupe tout récent, formé en 2006 sur les cendres de Synopsis et qui déboule dans les bacs fins 2007 avec un véritable OVNI, « World Under Control » ; un OVNI fait de métal à tendance progressive.
Un premier riff, des claviers étranges, et l’album démarre sur un son de guitare néo bien lourd pour un morceau qui ne manque pas de pêche. Des vocaux très variés, dont une voix qui peut prendre les intonations de Jon Oliva, animent l’ensemble. Il y a bien quelques effets superflus, notamment sur les voix justement, mais c’est accrocheur.
« Ices Sensations » tente mettre une ambiance inquiétante ; notes de piano, voix sombre et claire, chuchotements et puis laisse place à « Amazone » qui contient quelques passages typiques de speed mélodique alternés à des accents plus métalliques. Les vocaux en clair et la mélodie sont très réussis, l’énergie passe, mais les claviers sont parfois envahissants.
Le morceau suivant alterne riff de guitare et flamenco. Il enchaîne sur du "System of A Down" pour revenir à la guitare acoustique sur laquelle se pose des vocaux déchirés et un clavier aérien à la Lena Lovitch. Ouf, et je simplifie! C’est bizarre, un peu fourre tout, un peu lourd aussi, mais à nouveau, la conviction du groupe fait passer la chose.
Arrive ensuite une des pièces maîtresses de l’album, « Uncolored Nightmare », qui donna partiellement son nom au groupe. Les deux premières minutes arrivent à cadrer l’ambiance, entre Pink Floyd, Tool et Bowie période Eno. Chuchotements, bruitages, vocaux plaintifs, percussions entourent une musique où les claviers sous influence classique dominent. Le morceau n’est toutefois pas dénué de mélodie, et les quelques notes de piano bien distillées sont savoureuses. Il y a sans doute un peu trop de tout, mais cela fonctionne. La dernière minute et son envolée guitaristique et vocale est excellente, elle aurait pu se prolonger.
Les bruitages de « Marie Stuart » nous replongent à cette époque reculée. Des chœurs grégoriens, une sonorité de cornemuse (Marie Stuart était aussi Marie Ière d’Ecosse) accueillent une rythmique presque dansante et un riff de guitare bien gras. L’alternance de vocaux appuyés encadrant la mélodie chantée est réussie. Le morceau est surchargé par quelques vocaux sombres inutiles, mais c’est quand même pas mal. Le tempo enlevé apporte de la variété à l’album.
« Town Under Control » est une complainte désespérée agrémentée de bruitages originaux, d’une basse bien mise en évidence, et de guitares très mélodiques. Joli et agréable.
C’est avec « White Death » que Uncolored Wishes intègre le mieux toutes ses influences. Sur l’intro à la guitare acoustique, la voix apparaît sous un jour différent, jusqu’à rappeler Roger Waters de Pink Floyd. La guitare bien plombée alterne ensuite avec des notes de piano aériennes, les vocaux se font calmes ou rageurs et là, c’est carrément Jon Oliva de Savatage qui s'invite. La suite s’enflamme et le piano un peu rock’n roll sur des riffs de heavy métal évoque l’ambiance du « Marshall Plan » de Blue Oyster Cult. La construction et la passion sont dignes de Savatage. Superbe !
L’album se clôt sur une « Final Dance » ; un rock endiablé digne d’un Ian Hunter ressuscité, fusionnant agréablement modernité et racines rock’n roll. Mais avant cette petite gâterie, il y a « Regression », une pièce étrange mais éloquente quant aux qualités et défauts du groupe. Elle débute par une voix masculine parlée et quelques sonorités classiques ou modernes entremêlées. La voix féminine qui enchaîne en français interpelle et illustre bien la pochette du CD. Le tout est un peu décousu mais offre quand même un très bon riff de guitare, malheureusement pas assez mis en valeur. Par contre, les effets sur les vocaux masculins ne sont pas à la hauteur. Le chanteur a suffisamment de potentiel pour ne pas s’encombrer de ces artefacts superflus qui gêne l’émotion. Manque de confiance en soi peut-être, c’est un tort!
Le groupe a, indéniablement, le sens de la mélodie et du riff qui accroche. Il sait créer des ambiances, construire sa musique, et le registre vocal est très large. La section rythmique est exemplaire, et à l’aise dans tous les styles proposés. Mais pour atteindre ses objectifs, il utilise beaucoup trop l’artillerie lourde ; nous aurions préféré quelques frappes chirurgicales. En choisissant les meilleurs effets, en privilégiant l’émotion à l’originalité à tout prix, bref en étant un peu plus exigeant sur les nombreuses idées qui germent en eux, leur musique ferait encore mieux mouche et nous aurait touché beaucoup plus.
Ah oui, le groupe est français, de Lyon, et à une période où l’on rationne plutôt qu’on ne donne, il ne faut pas trop faire la fine bouche sur tant de générosité dans les idées. Un album imparfait, mais jouissif et incontournable pour les fans de métal prog ! A suivre de près et à voir sur scène également !