Après la fabuleux « Toys In The Attic », le défit qui s’offre à Aerosmith n’est pas des plus faciles à aborder. En effet, comment se maintenir au plus haut niveau, sans pour autant donner dans l’auto plagiat ? Malgré l’ampleur de la tâche, les 5 de Boston vont pourtant trouver la formule gagnante. Si Jack Douglas reste derrière les consoles et l’enregistrement se fait encore dans un studio New-Yorkais, le contenu musical n’en évolue pas moins pour autant pour faire de « Rocks » un nouvel album incontournable que de nombreux fans considèrent même comme le meilleur du combo.
Pour cela, Tyler, Perry & Co. durcissent le ton et nous assomment d’entrée avec un « Back In The Saddle » au riff à la fois heavy et sophistiqué, suivi d’un « Last Child » qui nous surprend avec un riff heavy-funk après une intro aux harmonies vocales romantiques digne des Beatles. La suite reste du même niveau, à la fois puissant et finement ciselé. « Rats In The Cellar » accélère le tempo avec son blues-rock sous amphétamines, et son solo endiablé où l’harmonica de Tyler et la guitare de Perry s’en donne à cœur joie avant un final que rien ne semble pouvoir arrêter, tandis que « Combination » est chanté à 2 voix sur sa quasi-intégralité, pour un résultat heavy presque étouffant.
L’alternance entre titres heavy et titres plus rock’n’roll se perpétue avec un « Sick As A Dog » où Steven Tyler nous gratifie de nombreux trémolos et est soutenu par des chœurs omniprésents. Le tempo s’alourdit de nouveau avec un « Nobody’s Fault » dont les couplets semblent tout droit sortis d’un album de Judas Priest. La fin de l’album est moins sombre avec un « Get The Lead Out », hard US aux couplets festifs, « Lick And A Promise », qui donne dans un registre équivalent, et l’incontournable exercice de la power-ballade représenté cette fois-ci par « Home Tonight ».
Si aucun des 9 titres ne souffre d’une quelconque faiblesse, il est à noter que la production est majoritairement plus sombre, ce qui d’ailleurs, met plus en relief le jeu de Tom Hamilton, bassiste injustement sous-estimé. Il est en effet époustouflant de constater ses capacités à suivre les dérapages et autres accélérations aussi soudaines que dangereuses de Joe Perry. Ce dernier et son compère Tyler commencent à mériter leur surnom de Toxic Twins, la composante psychédélique de cet album laissant supposer que l’inspiration a pu venir de fumées plus ou moins colorées. Enfin, cette chronique serait incomplète si elle oubliait la frappe lourde et dynamique de Joe Kramer et le rôle incontournable d’un Brad Whitford que la forte personnalité de Joe Perry fait injustement oublier.
Aerosmith réussit donc l’exploit rare de se maintenir aux sommets, tout en faisant évoluer sa musique et en faisant preuve à la fois d’une grande maturité et d’un esprit d’aventure. Autant dire que cet album est incontournable au même titre que son prédécesseur et que la capacité d’Aerosmith à renouveler ce genre de prestation justifie le statut de légende dont bénéficie désormais le groupe.