Guitariste connu pour ses apparitions dans de nombreux albums et comme étant le guitariste attitré de Billy Idol, Steve Stevens revient sur le devant de la scène avec son nouvel album: Memory Crash. A cette occasion, le new-yorkais s’est adjoint les services du batteur Brian Tichy (Pride & Glory entre autres) et du chanteur de King’s X, Doug Pinnick, sur le titre « Day of the Eagle ». Pour le reste c’est Steve en personne en charge des guitares, des basses et des nombreux effets émaillant le disque. Parmi ses anciennes contributions remarquées on peut citer le trio qu’il formait avec Terry Bozzio et Tony Levin lors de deux albums ainsi que son dernier opuscule solo, Flamenco A Go Go, sorti en 1999. C’est dire si ce Memory Crash était attendu par tout le microcosme métallique.
L’attente aura été longue mais la récompense est à la hauteur de notre désir car l’album est de bout en bout passionnant. Steve Stevens varie les ambiances, les tempos et les styles avec doigté et finesse pour composer un album multicolore et riche. La majorité des titres sont instrumentaux et Stevens ne tombe pas dans la platitude ni la pâle copie de ce qui existe déjà.
Le rock traditionnel est évidemment mis en valeur avec une prédominance à ce qui groove ; mélange de funk-rock ou blues-rock boogie (« Cherry Vanilla » et « Hellcats Take The Highway ») avec des rythmes très enlevés. L’instrumentale plus moderne n’est pas oublié avec « Small Arms Fire », son riff gras et son intro flamenco ou « Prime Mover » et ses bruitages du plus bel effet.
Steve Stevens est un guitariste exceptionnel car il maîtrise aussi bien la guitare classique, et plus particulièrement le jeu flamenco, que la guitare électrique. Possédant un bagage technique impressionnant, il se sert de son habileté avec intelligence sans éclabousser l’auditeur d’une quelconque infatuation à la Malmsteen. Les soli sont bons, très bons même (comme sur « Prime Mover » par exemple) mais jamais outranciers et sont là exclusivement pour servir le propos mélodique du morceau. Les effets en tout genre sont mis en avant avec parcimonie et goût : la pédale Whammy dans « Memory Crash » ou la Wah Wah dans « HellCats Take The Highway » et « Cherry Vanilla ». On retrouve dans « Memory Crash » l’influence de Steve Vai période Fire Garden, mais un très inspiré Stevens vient y ajouter quelques nappes et boucles d’effet donnant une incroyable épaisseur sur la deuxième partie du morceau. Comme dans la plupart des morceaux, la trame peut paraître simple et classique mais une foultitude de petits détails viennent se greffer pour rendre les mélodies très originales. La ballade « Water on Ares » illustre parfaitement la richesse des sons et des harmonies dont Stevens a le savoir-faire.
Les deux seuls morceaux chantés sont une vraie réussite avec la présence de Doug Pinnick sur le rock très hendrixien « Day of The Eagle » (pouvait-il en être autrement avec le timbre de Doug ?) et surtout avec la pépite « Josephine ». Ce morceau très progressif commence sur une magnifique mélodie arpégée avec des effets et des voix éthérées lui donnant une légèreté très agréable. La partie instrumentale du morceau est tout aussi magnifique dans sa construction très yessienne et il n’est pas étonnant que ce morceau soit dédié à Steve Howe, génial guitariste de Yes. Cette pièce de près de sept minutes justifie presque à elle seule l’acquisition de cet album.
Signalons la présence de deux courts instrumentaux rappelant la bonne vieille tradition des albums instrumentaux d’antan : les très Vaiens « Heavy Horizon » et « Joshua Light Show » qui, s’ils ne proposent rien de transcendant, ont la vertu de quadriller l’album, un en début de disque et l’autre au milieu, sorte d’entracte au spectacle.
En conclusion, on peut l’affirmer haut et fort, c’est un retour gagnant pour Steve Stevens avec Memory Crash, un album à la fois moderne et fort agréable, mélange d’influences et de créativité pure. Devant le mutisme des principaux guitaristes instrumentaux (Steve Vai ou Joe Satriani en tête) cet album va certainement trouver sa place dans votre discothèque. Il ne sera pas nécessaire pour cela d’être guitariste ou apprenti shredder mais simplement d’apprécier la musique faite avec humilité et talent.