Paru un an après "Rain Dances", "Breathless" peut être considéré comme son frère jumeau : même line-up, même philosophie de conception, avec cette orientation Canterbury-jazzy apportée par le duo Sinclair (basse) - Collins (sax). Par contre le côté “symphonique” a pratiquement disparu , et l’album souffre d’un défaut d’homogénéité qui le rend moins attachant que son prédécesseur.
En effet, certains pistes paraissent très anodines dans une production habituellement plus ambitieuse : passons sur le rural 'Down On The Farm', dont la composition signée Sinclair, très foutraque et sans intérêt, est complètement en dehors de l’esprit de Camel. L'auditeur notera que certains titres ont pris un rude coup de vieux, que ce soit à cause de la rythmique simplette ('Wing And A Prayer', 'You Make Me Smile'), de l'atmosphère ('Starlight Ride', très musique d’ambiance), ou les orchestrations ('Rainbow’s End', avec ses trompettes échappées de "Sgt Pepper’s").
Le côté jazzy est présent mais plus discrètement que dans "Rain Dances" : 'The Sleeper' est un essai louable de départ languide pour breaker sur une instru guitare/sax, mais c’est un essai incomplètement transformé.
Restent deux morceaux qui marquent l’album : 'Echoes', l’exemple-type du titre à variations d’ambiances, passant des claviers à la guitare, s’autorisant de nombreux changements de rythme. C’est inventif, varié, stimulant, un des sommets de la collaboration Latimer - Bardens. Et puis le surprenant 'Summer Lightning', dont le début fait craindre le pire, avec son ambiance pseudo-disco avec chœurs idoines, solo de synthé psychédélique ... Et puis ... et puis la guitare de Latimer s’envole, mitonnant un solo dont lui seul a le secret, et la sauce prend : enthousiasmant ! C’est en fait la première fois que la guitare prend la première place très en avant dans les productions du groupe, loin des synthés, une place qui sera la sienne dans certains des morceaux phares du groupe, 'Ice', 'Stationnary Traveller', ou 'The Hour Candle' pour ne citer que les exemples très marquants.
Comme pour "Rain Dances", tout ça ne fait pas un album majeur de Camel, mais l’amateur sera bien avisé de jeter une oreille sur "Breathless" pour compléter sa connaissance du parcours d’un tout bon guitariste et compositeur ....