Depuis une dizaine d’année Paul Gilbert suit sa route, totalement émancipé de l’aventure qui l’avait fait connaître avec le fameux groupe MrBig. En 1998 sortait King Of Clubs, son premier album solo. Celui-ci mélangeait des chansons mélodiques aux textes souvent humoristiques et des passages instrumentaux fortement teintés de néoclassique. Paul Gilbert sortit quelques bons CD (onze pour être exact) dans la même trempe que son Roi de Pique et ce n’est que très récemment qu’il entama de composer des albums totalement instrumentaux. Après Get Out Of My Yard, Gilbert nous propose son deuxième instrumental: Silence Followed By Deafening Roar.
La maîtrise technique du géant blond est impressionnante et il possède parfaitement tout le bagage technique du guitariste moderne idéal. Sa créativité dans la construction de morceaux chantés n’est plus à démontrer et la seule interrogation serait plutôt à chercher au niveau de la difficulté à rester inspiré et à tenir l’auditeur en haleine dans le périlleux exercice de l’album instrumental.
Comme tout bon virtuose qui se respecte, Paul Gilbert n’est pas avare en descentes de manche, arpèges, tapping et autres gammes sweepées. On a recensé 5 898 653 notes dans cet album avec une incertitude de +/- 5% obligatoire due la vitesse supersonique de certains passages. Dans cet océan, que dis-je, ce tsunami de notes, quelques belles mélodies pointent le bout de leur nez (« Norwegian Cowbell » ou « The Gargoyle ») alors que d’autres séquences restent très peu attrayantes si vous ne portez qu’un intérêt limité à la virtuosité pure (« Bronx 1971 »).
Malheureusement trop peu de titres tiennent l’auditeur attentif d’un bout à l’autre sauf peut-être « Bultaco Saturno », « The Rhino », « Silence Followed By Deafening Roar » ou « Suite Modale ». Concernant ce dernier titre il faut avouer que Paul Gilbert a réussit à nous bluffer avec 2’38 de pur plaisir pour cette version retravaillée du compositeur suisse Ernest Bloch. « Suite Modale » est duo piano-guitare plein de retenue et de finesse et qui vient contraster avec la débauche tape-à-l’œil du reste de l’album. Paul Gilbert fait sonner sa guitare comme un instrument à vent (la flûte qui est l’instrument en duo avec le piano originellement) donnant une rondeur et une expressivité magnifique à son jeu. On regrette quand même que cet album n’ait pas plus pris le parti de ce type de composition.
Les ballades qui font souvent office de tarte à la crème dans ce genre de disque, sont ici bien salvatrices pour le repos des organismes (« I Cannot Tell A Lie » ou « I Still Have The Other Girl »). Heureusement Silence Followed By Deafening Roar ne dépasse que de très peu les 42 minutes et on en ressort pas tout à fait écœuré non plus.
Paul Gilbert est vraiment un virtuose de la technique dite de l’aller-retour et son disque a de fortes chances de ne faire qu’un aller-retour expéditif dans votre platine si vous ne recherchez que l’originalité ou si la démonstration technique vous rebute. Si vous ne faites pas partie de ces deux catégories là, vous pourrez alors être séduit par Silence Followed By Deafening Roar qui n’est pas mauvais album, loin s’en faut, mais qui souffre des caractéristiques citées précédemment et inhérentes à beaucoup d’albums de guitare. On ne peut qu’espérer que Paul Gilbert retrouve un schéma qui a si bien fonctionné par le passé, à savoir un bon dosage de chansons et d’instrumentaux.